Durant la fin de semaine des 20 et 21 février, l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO) a tenu son assemblée générale annuelle. En cette occasion, un prix de reconnaissance, le Mérite franco-ontarien, a été remis à deux de ses membres : Lise Groleau, enseignante à l’École élémentaire catholique Notre-Dame-du-Sault, à Sault-Sainte-Marie, et Luc Bernier, enseignant à l’École secondaire Étienne-Brûlé, à Toronto.
C’est une collègue de M. Bernier, Julie-Nadia Rancourt, qui avait préparé le dossier de sa candidature et c’est à la mi-janvier que l’AEFO a annoncé à l’enseignant de théâtre qu’il avait été sélectionné.
Le syndicat avait pour l’occasion préparé une mise en scène, faisant croire à Luc Bernier qu’il s’agissait du tournage d’une capsule formative, pour en fait le surprendre en lui révélant qu’il était récipiendaire du Mérite franco-ontarien! Une vidéo hommage à M. Bernier, basée en partie sur ce moment empreint d’émotions, se trouve sur la chaîne YouTube du syndicat.
Mais Luc Bernier a-t-il encore besoin d’être présenté dans la Grande région de Toronto? Après 32 ans d’enseignement à l’École secondaire Étienne-Brûlé où il a été le metteur en scène de 28 productions théâtrales et de 10 soirées cabaret, il aura définitivement laissé sa marque sur le milieu culturel de la métropole.
Qu’est-ce qui, au départ, a orienté M. Bernier vers le théâtre? Comme dans bon nombre d’histoires de ce genre, il y a un début qui n’a rien à voir avec la fin, puisque c’est de géographie que ce Québécois d’origine a d’abord été passionné.
En trame de fond de ses études postsecondaires dans ce domaine se profilait cependant le théâtre par le biais, d’abord, d’activités parascolaires, puis d’une éducation plus formelle.
« Le goût est arrivé là. À l’université, j’ai suivi des cours optionnels en théâtre. Je me suis aperçu par le théâtre qu’il y avait quelque chose en moi que je ne connaissais pas », raconte le principal intéressé.
Son goût pour cet art de la scène a peu à peu éclipsé celui pour les caractéristiques de la planète Terre et, d’enseignant de géographie, Luc Bernier est devenu enseignant de théâtre. Un choix qu’il ne regrette nullement, loin de là, lorsqu’il considère tout ce que cette discipline apporte aux élèves qui s’y investissent.
« Il y a ce que l’on appelle l’estime de soi. Le théâtre permet de prendre sa place », explique l’enseignant. En effet, il est très valorisant pour les jeunes de livrer un produit apprécié du public et d’en constater l’impact immédiat par, notamment, les rires et les applaudissements.
Les comédiens ne sont pas les seuls à recevoir ainsi les éloges de la foule : les membres de l’équipe technique savent aussi combien la qualité et le bon déroulement d’une pièce reposent sur leurs talents et leur professionnalisme.
Qui plus est, les arts ne contribuent pas seulement au développement de la créativité, mais aussi de l’autonomie, puisqu’une pièce nécessite que le travail des uns soit coordonné à celui des autres, une réalité qui va de pair avec le sens des responsabilités.
Au bout du compte, ce ne sont pas que les élèves qui en retirent quelque chose de positif, mais aussi les adultes qui les encadrent. « C’est ce qui est gratifiant au théâtre : voir des jeunes grandir et s’épanouir », commente M. Bernier.
Le prix du Mérite franco-ontarien constitue le couronnement de la carrière de Luc Bernier et aussi sa conclusion heureuse. En effet, comme toute bonne chose a une fin, c’est la retraite qui attend l’enseignant à la fin de la présente année scolaire. Bien des choses vont lui manquer : la formation des jeunes, voir leurs talents s’exprimer, l’épatement du public, la joie de voir qu’un travail de longue haleine porte ses fruits, etc.
La dimension communautaire des pièces annuelles, c’est-à-dire les échanges avec le public une fois le spectacle terminé, était aussi pour lui d’un vif intérêt : « C’était non seulement un événement théâtral, mais aussi un rassemblement francophone ».
Luc Bernier n’aura pas à se confiner dans le passé pour revivre ces beaux moments puisque le Théâtre Étienne-Brûlé, la troupe scolaire qu’il a créée en 1993, continuera d’éblouir les Torontois.
Il aura aussi la joie de voir certains de ses anciens élèves poursuivre un cheminement qu’il aura contribué à façonner. On n’a qu’à penser à Mani Soleymanlou, récemment nommé directeur artistique du Théâtre français du Centre national des Arts à Ottawa, à Victor Andrés Trelles Turgeon, comédien au grand et au petit écran, à Fabienne L’Abbé, productrice et conceptrice de contenu à TFO, etc.
La remise de ce prix du Mérite franco-ontarien, au-delà de l’hommage, a donc aussi été un témoignage de gratitude à l’endroit de Luc Bernier pour sa contribution au milieu culturel francophone et un rappel de l’importance de l’école dans le parcours de vie de tout un chacun.
PHOTO – Luc Bernier