Jean-François Girard

Présent en nombre au Festival international du film de Toronto (TIFF) avec 161 professionnels accrédités, le monde du cinéma québécois se retrouvait au restaurant Ocho sur Spadina, le lundi 11 septembre. Ce traditionnel 5 à 7 au milieu du TIFF était organisé par le Bureau du Québec à Toronto et la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC). Pour le cinéma québécois, le festival est une porte d’entrée vers le reste du marché canadien et mondial.

L’édition 2023 est marquée par l’absence de nombreuses célébrités, en raison de la grève des scénaristes américains. Mais les productions québécoises voient cette situation comme une opportunité. « On est allé chercher quelques places qui se sont libérées », raconte Olivier Saint-Pierre, délégué à la promotion et à la diffusion du cinéma de la SODEC. Le Québec comptabilise 19 productions : 9 longs métrages, 9 courts métrages et 1 série.

Ce n’est « pas une édition record », précise Olivier Saint-Pierre mais 2023 reste « une bonne année marquée par plus de réalisations de femmes et plus de diversité ». Autre avantage à exploiter, l’attention médiatique d’habitude tournée vers les stars se porte un peu plus sur les films moins connus.

À l’apéritif, les professionnels qui se croisent sont à différentes étapes dans leur cheminement. Pour Henri Pardo par exemple, réalisateur Kanaval, « on vient à peine de finir le film », souffle-t-il. Le 11 septembre, il avait passé ses projections et ses rencontres des premiers jours avec le grand public et les professionnels.

« Le flambeau est maintenant passé aux producteurs », ajoute-il, presque soulagé. Mais il est « resté quelques jours de plus » pour son premier TIFF en tant que réalisateur « et comme spectateur ». Son film en français et en créole aborde la relation mère-fils, la culture haïtienne, la spiritualité. « Il y a une belle réception, les gens ont vécu ça ». L’action se situe en 1975, mais est relativement intemporelle vis-à-vis de l’immigration haïtienne au Québec.

L’état d’esprit est différent pour Kim O’Bonsawin, réalisatrice de Laissez-nous raconter. Cette série documentaire lumineuse de quatre épisodes sur la culture et la résilience de 11 Premières Nations du Québec est déjà diffusée sur Tou.tv, la plateforme de Radio-Canada, et sera bientôt disponible sur Gem, celle de CBC. « Un an après, la série commence sa vie internationale », dit-elle. Les versions sont légèrement différentes pour le public québécois, anglo-canadien ou international. Pas encore diffusée au TIFF, la réalisatrice issue de la nation Abenaki avait alors « hâte aux échanges avec le public » lors de notre rencontre.

Jean-Christophe Lamontagne, président de h 264, la société de distribution de Vampire humaniste cherche suicidaire consentant, tout juste primé comme meilleure réalisation dans la section parallèle du festival de la Mostra à Venise, explique quant à lui l’importance « essentielle pour le succès » d’un festival dans la vie des films d’auteur. « Un festival donne un contexte, une intention autour du film et bien sûr une visibilité médiatique pour qu’il aille ailleurs ensuite. Après un succès, il y quelque chose d’un peu aléatoire qui nous échappe. Proposer un film de vampires dans un festival, c’est presque une antithèse. »

Après le TIFF, le film de d’Ariane Louis-Seize va retourner en Europe, avec des festivals à Sitge (Espagne), Leeds (Royaume-Uni) et La Roche-sur-Yon pour sa première française. Pour signer des contrats de diffusion, la boîte de production doit s’adapter aux spécificités de chaque marché étranger. Présent en début d’apéritif, le producteur file à une projection du film à 18 h 30.

La présidente de la SODEC, Louise Lantagne, qui revient également de la Mostra relève quant à elle « qu’à Venise les deux pays à l’honneur étaient l’Allemagne et le Québec », pas peu fière de voir ce pan de l’industrie culturelle québécoise reconnue comme une entité à part entière, à égal avec d’autres pays.

Photo : Le monde du cinéma québécois s’est retrouvé au restaurant Ocho le 11 septembre.