L’atelier d’Éric Farrache mériterait à lui seul tout un article. Il est tel qu’on aimerait que tous les ateliers d’artistes soient. Un joyeux capharnaüm, un agréable bazar, une caverne d’Ali-Baba, perchée en haut d’un escalier lui-même situé au bout d’un corridor à l’odeur de gaz d’un vieil immeuble du quartier Cabbage-town.
Au sol, un vieux tapis marocain, ramené du pays natal par les parents de l’artiste. Sur les étagères, des figurines de Star Wars côtoient des figures religieuses syncrétiques d’Argentine et d’autres, inclassables, inconnues. Une table à dessin trône au milieu de la pièce principale qui baigne dans la claire lumière matinale. La collection étrange d’objets biscornus continue dans la cuisine. Une théière en forme de Big Ben, une montre, un holster de revolver, une horloge, un tableau de la reine plus jeune, un menu du restaurant de luxe parisien Maxim’s de 1982, etc.
« Quand mes parents sont arrivés, ils ont arrêté de jeter les choses. Je fais pareil », explique Éric Farrache, qui a longtemps habité dans son atelier. Sur la table, près de la cafetière, de vieux magazines érotiques des années 1970, des Pent-house récupérés devant une décharge. « Les corps sont représentés différemment. Photoshop n’existait pas à l’époque. Et ces magazines m’aident beaucoup à trouver des positions pour mes pin-ups. »
Éric Farrache travaille en ce moment sur les pin-ups, mais aussi sur des héros. « Je crée ma propre mythologie, mon panthéon personnel », dit-il. Un panthéon ironique et drôle. Éric Farrache travaille beaucoup sur le rapport de l’image et de l’écrit. Il écrit une bande dessinée depuis plus d’un an. « Je me suis intéressé aux bandes dessinées avant qu’elles ne soient à la mode, raconte-t-il. Quand elle était aux marges de l’art. »
Éric Farrache s’est fait connaître pour ses portraits de G-I Joe et ses pin-ups accompagnées d’un petit texte ironique et malicieux. Après une enfance et une jeunesse turbulente en banlieue, où sa famille juive marocaine a élu domicile, Éric Farrache a étudié les arts à Toronto. « Je parle français avec ma mère et mes deux filles. Je vois la bataille dans sa tête entre le français et l’anglais », pousuit-il. Une partie de la famille d’Éric Farrache vit à Toulouse, où lui-même a vécu à l’âge de 14 ans. La langue française lui a donné une vision mondiale de la culture. Et sa ville, Toronto, aussi. « Les gens viennent de partout. Il y a une vraie curiosité pour le reste du monde. », ajoute l’artiste.
Prochainement, Éric Farrache exposera à la Loop Gallery, au 1273, rue Dundas Ouest. Le vernissage aura lieu le 25 mai. Puis, dans le cadre du Dundas West
Festival, il participera à un panel sur l’art, et il continuera à travailler sur sa bande dessinée et sur son « panthéon », dans son atelier, après avoir déposé ses filles à l’école.
Photo : Éric Farrache