Djennie Laguerre, artiste multidisciplinaire, parcourt la scène des arts ontarienne depuis plusieurs années. Auteure de quelques pièces, interprète de nombreux rôles au sein des compagnies majeures, dont le Théâtre Catapulte et le Théâtre français de Toronto, et elle se retrouve aussi au petit écran, notamment avec Mini TFO.
En 2008, elle arrive avec l’idée de Rendez-vous Lakay, une œuvre solo qui plonge l’auditoire dans l’univers des rites funéraires en Haïti. Plusieurs projets plus tard, l’artiste est de retour avec une nouvelle œuvre solo : Manman la mer. Manman, qui est le mot créole, vous l’aurez deviné, pour maman.
Elle explique que la pièce, originalement la deuxième partie de Rendez-vous Lakay, a pris un tournant spirituel. Une ode aux femmes. C’est l’histoire de trois générations, la main du destin et de leur destinée », explique-t-elle. Et puis cette femme au centre de l’histoire est en réflexion et en résolution de conflits personnels enfuis si loin et depuis si longtemps qu’ils en étaient poussiéreux.
Avec cette nouvelle pièce, Mme Laguerre désirait ardemment mettre de l’avant la culture de conteuse, une partie intégrale de l’héritage haïtien. La pièce veut engendrer une prise de conscience chez son public et explorer l’aide offerte par la spiritualité et les esprits protecteurs.
D’ailleurs, son personnage dans la pièce est par moment accompagné de cet esprit protecteur pour qu’elle puisse résoudre ses maux et avancer avec toute confiance. Mère, Mme Laguerre a voulu célébrer les liens intergénérationnels en partageant les difficultés et la beauté du rôle de mère et de fille.
Développée en 2019 avec Théâtre Catapulte, Manman la mer est finalisée en 2020 et une tournée est prévue. La petite troupe se rend jusqu’en Côte d’Ivoire au festival Masa avant que la pandémie frappe et reporte leurs plans indéfiniment.
Ils se sont quand même rendus au Québec où l’artiste affirme avoir été agréablement surprise par « de belles discussions et communications entre les Québécois et les Haïtiens suite à la pièce ». Pour les communautés francophones marginalisées, c’est un point gagnant aux yeux de Mme Laguerre qui est fervente à l’idée que « l’amour gagne par-dessus tout ». Et il en est temps.
Mme Laguerre avoue avoir eu beaucoup plus de facilité en anglais, à ses débuts, il y a plusieurs années. « La communauté anglophone a toujours eu un peu d’avance avec l’inclusion de la diversité », dit-elle, mais sans reproche dans la voix.
Elle ajoute que, même s’il reste du chemin à parcourir, la communauté artistique francophone s’est beaucoup améliorée dernièrement et elle se sent beaucoup plus accueillie maintenant. Elle aime faire son travail dans les deux langues officielles. D’ailleurs, Mme Laguerre espère pouvoir faire une résidence à Toronto pour traduire Manman la mer en anglais pour l’offrir à un plus grand public torontois.
En attendant, l’artiste se tient occupée avec ses ateliers et son art de conteuse. Elle précise que la transition au virtuel n’a pas été trop difficile, car l’art du conte peut être partagé avec un écran aussi. Aussitôt que les théâtres rouvrent, Mme Laguerre est prête à repartir en tournée!
SOURCE – Élodie Dorsel
PHOTO – Djennie Laguerre, à l’avant-plan, dans Manman la mer