Richard Caumartin

L’ACFO-Toronto a organisé une conférence à la Rotonde du Metro Hall, le 25 septembre, pour souligner les 50 ans du drapeau franco-ontarien. Intitulée Les services et droits des francophones à Toronto : hier, aujourd’hui et demain, cette discussion, animée par Marjorie April, a permis à quatre leaders de la communauté francophone de décortiquer et analyser les avancées, les enjeux et l’avenir de la communauté francophone de la métropole canadienne.

Les panélistes étaient Christine Michaud (vice-présidente du comité consultatif des Affaires francophones de la Ville de Toronto), l’avocat Nicolas Rouleau (défenseur innovant du droit et de la justice), Dada Gasirabo (pionnière engagée pour l’accès aux services en français des femmes francophones), et Gilles Marchildon (bâtisseur engagé du progrès social et de la francophonie torontoise).

Le président de l’ACFO-Toronto, Jean-Claude N’da, a prononcé le mot de bienvenue. « Notre objectif est de profiter des perspectives de nos leaders. Nous avons des idées et nous voulons mettre en lumière l’étendue actuelle de notre communauté. Nous nous sommes donnés pour objectif ce soir de partir avec des projections concrètes pour l’avenir, une grande première pour l’ACFO-Toronto », dit-il.

La modératrice du panel a ensuite pris la relève pour la discussion. Mme April a raconté d’entrée de jeu son cheminement depuis son arrivée en Ontario en 2008, l’accueil dont elle a bénéficié et la chance que les francophones ont de pouvoir prendre leur place à Toronto. Elle a d’abord demandé à Gilles Marchildon, qui avait 10 ans lorsque le drapeau franco-ontarien a été créé, de raconter comment c’était à l’époque dans son école dites « illégale ».

« Ça devient épuisant de souvent être obligé de revendiquer, de pousser, de poser des gestes politiques plutôt que de simplement profiter que le fait français est un acquis », explique M. Marchildon. Il a raconté que pour l’ouverture officielle de l’école dites de la résistance, une école illégale créée le 3 septembre 1979, plutôt que de couper un ruban comme c’est la façon de faire habituellement, nous avons scié une bûche. Ça représentait une lutte qui dépassait l’ordinaire. Même, plus récemment ici à Toronto, je salue les parents dans l’Est de la ville qui ont dû revendiquer comme nous l’avons fait à Penetanguishene pour qu’il y ait l’ouverture d’une école secondaire de langue français dans ce quartier.

À cette époque, le Conseil scolaire de Simcoe a continuellement refusé d’investir dans une école « homogène », c’est-à-dire un établissement de langue française où toutes les activités et cours sont offerts en français. « Nous avons voulu poser un geste politique qu’on pensait qui durerait peut-être deux ou trois semaines en ouvrant une école illégale qui n’était pas reconnue par le ministère de l’Éducation, mais nous étions loin de nous douter que ce moyen de pression allait se poursuivre pendant toute l’année scolaire », se souvient Gilles Marchildon.

Nicolas Rouleau a poursuivi en disant qu’il est important d’avoir ces droits et qu’il est aussi primordial de les reconnaître. « Il faut continuer à sensibiliser le gouvernement à l’importance des francophones de façon historique, économique et communautaire aujourd’hui », insiste-t-il.

Ils ont cité en exemple la bataille pour l’hôpital Montfort, et Dada Gasirabo a exprimé le sentiment d’être la plus privilégiée des Franco-Ontariennes. « Née à l’extérieur du pays, lorsque je suis arrivée comme réfugiée, je venais d’une situation de féminicide où il n’y a plus de droits. À mon arrivée, j’habitais dans une maison d’hébergement et j’entendais parler de Montfort. Je lisais les nouvelles et je me suis dit : « les gens ici parlent, ils peuvent élever la voix ». J’ai suivi toute l’histoire et j’ai constaté combien la communauté s’est mobilisée. J’ai vu la manifestation et comment le changement se passe. Je me suis aperçue que j’étais vraiment tombée dans mon milieu puisque je suis une revendicatrice née. Alors coûte que coûte, je dois aller là-bas même si je ne connaissais rien des dossiers franco-ontariens », raconte Dada Gasirabo.

Peu de temps après, elle a été mise en contact avec Oasis et a revendiqué l’ouverture d’une maison d’hébergement pour femmes francophones qui est devenue l’organisme La Maison de Toronto, une étape importante du développement des services en français pour les femmes victimes de violence sous toutes ses formes.

Puis, les panélistes ont évoqué ce que le drapeau franco-ontarien représentait pour eux et pour la communauté dans son ensemble. Le mot de la fin, avant la période des questions, a été celui de Nicolas Rouleau.

« Il ne faut pas oublier que le drapeau franco-ontarien nous réunit et permet d’ancrer la communauté dans ses valeurs communes, insiste l’avocat. Je crois que c’est essentiel et il faut continuer de reconnaître ces symboles, pas juste le drapeau, mais aussi le Collège Boréal et l’Université de l’Ontario français, des institutions qui sont aussi des symboles forts de la communauté et de sa vitalité. » Les discussions se sont poursuivies avec le public autour d’un cocktail offert par l’ACFO-Toronto.

Photo : Les membres du conseil d’administration de l’ACFO-Toronto et les panélistes