Zombies, superhéros et autres créatures imaginaires sont sur le point d’envahir la ville. Le bien triomphera-t-il, une fois encore, du mal? La réponse se trouve certainement dans les allées de la Fan Expo. Du 31 août au 3 septembre, la 23e édition du salon dédié à la science-fiction et à l’horreur pose ses valises – pleines de planches et de bobines – au Palais des congrès du Toronto Métropolitain.
À leurs risques et périls, près de 130 000 amateurs du genre venus du monde entier se risqueront à rencontrer leurs personnages fétiches de jeux vidéo, de bandes-dessinées, de séries ou de films. C’est dans ce temple de la culture «pop » et « comic » qui rassemble chaque année un millier d’exposants que le public pourra voir le dernier épisode de Star Trek en compagnie des acteurs, assister à la première mondiale de la série Bad Blood, fêter le 20e anniversaire de la série Buffy contre les vampires, jouer à des jeux vidéo rétro, participer à des ateliers de dessin, des spectacles d’horreur et des séminaires sur les techniques de design 3D.
Venir à la Fan Expo, c’est aussi pour beaucoup l’espoir d’arracher un autographe, un sourire, un mot… aux stars d’ordinaire inaccessibles. Si les acteurs comme Lena Headay (Game of Throne), Richard Dreyfuss (Jaws), Anthony Daniels (Star Wars) et Norman Reedus (The Walking Dead) occuperont le haut de l’affiche, certains auteurs de bande-dessinée sont aussi très attendus.
Et c’est bien vers un certain Yanick Paquette que les regards seront tournés. Le prolifique auteur québécois, créateurs d’innombrables histoires de Superman, Batman, Wolverine et autres Swamp Thing est une des pointures de la « BD » qui a su, en une vingtaine d’années, se rendre indispensable aux yeux des géants américains DC Comic et Marvel, collaborant avec brio avec les scénaristes Alan Moore ou Grant Morrisson.
« La Fan Expo est mon pied-à-terre le plus proche de Montréal, affirme Yanick Paquette. C’est un endroit privilégié pour faire la promotion auprès des lecteurs et surtout pour côtoyer les autres professionnels. »
Le dessinateur s’est éloigné du rythme effréné de la bande dessinée mensuelle pour se consacrer à un roman graphique sur Wonder Woman, intitulé Earth One. Traduit en 14 langues, le premier volume est sorti en 2016. « C’est un rythme plus humain qui permet une réelle discussion entre le dessinateur et le scénariste pour façonner une histoire dans laquelle le dessin a une part immense dans la scénarisation implicite : l’expression, la posture, le nombre de cases, etc. »
Yanick Paquette prend des libertés et défend ses positions artistiques. Bien sûr dans la limite du possible, même si parfois, avoue-t-il, la controverse fait du bien au genre. « Je représente une princesse Diana sexuelle mais aussi en prise avec la société et ses enjeux politiques, explique-t-il. L’héroïne évolue dans le décor utopiste des Amazones puis dans la réalité, où les femmes y sont toujours belles mais ne correspondent pas aux canons de beauté. »
S’il conserve tous les codes du superhéros « complètement extraterrestre », le Montréalais tend à estomper les traditionnelles exagérations. « On est sorti de l’hyper sexualisation et de la naïveté des années 1990. La bande dessinée conservera toujours un parfum d’érotisme, certes, mais fait place à plus de diversité, à la fois physique et ethnique », analyse l’auteur dont l’art surfe sur la vague des adaptations cinématographiques.
« Il y a évidemment un vase communiquant entre le cinéma et la bande-dessinée. Cela se constate lors des grandes conventions comme celle de Toronto. Les fans comparent, débattent et s’approprient les personnages. Les héros deviennent du coup plus difficile à cultiver mais quand les notes sont justes et correspondent aux attentes, ça devient une religion. »
À la différence de la BD franco-belge, campée sur l’authenticité de l’œuvre, le « comic » américain évolue ainsi perpétuellement, ignorant la mode et les préjugés, donnant au crayon de Yanick Paquette les ailes pour voler dans des recoins inexplorés de l’imaginaire.
Photo (Y.P.) : Wonderwoman sous le crayon de Yanick Paquette.