Professeure agrégée au département de Santé et Société de l’Université de Toronto, Laura Bisaillon publie son premier ouvrage littéraire le mois prochain.
Comme le décrit Mme Bisaillon, il s’agit de « 284 pages de suspense littéraire avec l’ethnographie institutionnelle comme ancrage et une enquête du bas vers le haut qui part des femmes et hommes séropositifs ». Le livre explore la dissonance entre le savoir expert et le savoir expérientiel, dit ordinaire, des gens qui vivent et immigrent avec le VIH.
La conférence virtuelle du 13 avril présentée par le CRÉFO a réuni quelques professionnels afin de discuter de l’ouvrage et du système canadien d’immigration, ses politiques et pratiques d’interdiction. Samuel Lopez, cofondateur de Latino Positivo Ontario, était le modérateur.
Idil Atak, professeure agrégée du département de Criminologie à l’Université Ryerson (en processus de changement de nom), précise que c’est un livre très riche. « Il est très centré sur l’expérience des immigrants et leur donne une voix. Ça m’a rappelé ma propre expérience », partage-t-elle.
Au Canada, la santé est instrumentalisée pour exclure certains groupes d’immigrants, pourtant, Mme Atak rappelle qu’il n’y a pas beaucoup de témoignages sur ce sujet. « Le format narratif du livre rend la lecture très plaisante et poignante », remarque-t-elle.
Pour Janina Kehr, professeure titulaire à l’Université de Vienne, le livre explore pourquoi le VIH est tant criminalisé au Canada. « C’est un aperçu d’un Canada qui facilite la création de personnes vulnérables et qui est un état de haute surveillance pour certains », décrit-elle.
Le livre s’inscrit aussi dans le dialogue du domaine de la santé qui se voit forcé d’opérer sous l’influence de la loi. « Les docteurs qui sont obligés de modifier leur pratique ou code moral conformément à la loi, comment est-ce possible? », demande-t-elle.
La dernière intervenante, Maria Nengeh Mensah, est professeure titulaire à l’Université du Québec à Montréal. « Le livre établit de façon très intéressante le rôle du diagnostic du séropositif dans notre imaginaire. Le système considère certaines personnes comme souillées et Mme Bisaillon le démontre avec plusieurs exemples », explique-t-elle.
Elle considère l’ouvrage comme très pertinent sur le plan pédagogique aussi, car le format est très accessible. « Avec la pandémie actuelle, la question de pouvoir localiser l’Autre est absolument d’actualité », ajoute-t-elle.
Malgré que le terrain de recherche s’est surtout fait en français, avec des immigrants de langue française, le livre est écrit et publié en anglais pour diverses raisons. « Je veux absolument sortir une traduction vers le français aussitôt que possible », affirme Mme Bisaillon. Pour elle, l’importance d’amplifier les voix des personnes vivantes avec le VIH est primordiale.
Photo (capture d’écran) : Laura Bisaillon