« Nourriture à partager », dit l’affiche près d’un gros bac en bois où poussent des légumes. Elle ne manque pas d’attirer l’œil du visiteur du centre des loisirs de Chavagne, un petit village de Bretagne, en France.

L’idée est somme toute simple et originale. Planter dans un espace public, arroser, entretenir et partager les fruits de la récolte avec le reste de la communauté. Lancée il y a quelques années à Todmorden, un petit village du nord de l’Angleterre, l’initiative a fait des adeptes à travers le monde, jusque dans ce petit village peuplé d’irréductibles Bretons.

« J’aime manger. C’est la base de notre société, explique Élise Blanchet, la fondatrice du groupe des Incroyables comestibles de Chavagne. Faire pousser des légumes et des fruits fut le premier métier au monde et constitue le premier maillon de la chaîne alimentaire. »

À peine fut-elle installée dans le village qu’Élise entreprit d’inviter ses nouveaux concitoyens à faire pousser des légumes et des fruits dans des bacs en bois, installés dans des endroits accessibles à tous, et de partager la récolte avec tous ceux qui veulent bien se servir. Agronome de métier, Élise Blanchet estime que ses contemporains, des citadins pour la plupart qui ne trouvent pas le temps de cultiver leurs propres légumes, ont besoin de mieux comprendre comment ceux-ci arrivent sur leur assiette.

« Les gens ne comprennent parfois pas pourquoi on ne peut pas manger des tomates du coin en janvier », se lamente-t-elle. Elle s’inquiète à entendre dire que c’est en France qu’une chaîne de restauration rapide, bien connue sur tous les continents, ouvre le plus grand nombre de restaurants.

C’est dans le cadre de sa profession qu’Élise Blanchet fit la connaissance du mouvement Incredible Edibles. Cette organisation fondée par deux femmes a véritablement transformé un petit village anglais du Yorkshire durement touché par la crise économique en une communauté déterminée à travailler ensemble pour produire sa propre nourriture au sein même de la ville. Ce projet a acquis une telle notoriété que le prince Charles se rendit à Todmorden en 2009 pour leur apporter son soutien. Depuis, l’exemple de Todmordern a fait des émules puisque des groupes similaires se comptent désormais par centaines dans le monde, notamment en France et au Canada.

Élise Blanchet se mit à recruter parmi les membres d’une coopérative d’aliments biologiques de son village, créa une page Facebook et fit appel à l’expertise d’un groupe déjà existant d’une autre ville. Elle parvint même à attirer l’attention de la presse locale. Grâce au soutien du maire, deux grands bacs trônent maintenant au beau milieu du centre des loisirs. D’autres vont être installés d’ici peu dans des endroits bien fréquentés par les Chavagnais. Si le désir de manger de la nourriture saine soi-même reste bien entendu un des principaux buts, le projet vise aussi à susciter un esprit de coopération et de solidarité parmi la communauté. De racines citadines, Élise Blanchet ne cache pas son manque d’expérience en tant que jardinière. Sa franchise et son enthousiasme semblent déjà avoir conquis une vingtaine de personnes.

Au Canada, on trouve des parterres de légumes et de fruits dans les rues du quartier de Westmount à Montréal. À Toronto, de petits jardins publics apparaissent près de quelques centres communautaires, comme ceux de Wychwood Barns et de Scadding Court.

L’initiative de deux femmes en Grande-Bretagne pourrait un jour révolutionner la façon dont nous nous procurons la nourriture en milieu urbain. Il suffit d’avoir l’esprit de pionnier comme Élise Blanchet pour que le projet s’implante dans votre communauté. Pour plus de renseignements, le groupe des Incroyables comestibles Montréal possède une page Facebook en français.

Photo : Élise Blanchet, fondatrice des Incroyables comestibles