Au cours d’une conférence à l’Alliance française de Toronto, Anna Elena, ancienne danseuse à l’Opéra de Marseille, au ballet du Grand Théâtre de Bordeaux, puis au Landestheater de Linz (Autriche) et enfin à l’Opéra de Paris, a parlé des coulisses du métier de danseur. Danser, c’est plus qu’un métier. Pour certains, c’est une passion alors que pour d’autres, c’est une vocation qui rythme toute une vie et influence le danseur de multiples façons.
Le métier de danseur s’articule beaucoup autour du corps, « la manière dont va travailler le corps au fil des années, de la formation à la pratique du métier », confie Anna Elena.
Le cours doit être suivi cinq à six jours par semaine et précède les répétitions du spectacle du soir. Ce cours est constitué d’exercices à la fois à la barre et au centre et permet de chauffer les muscles et de préparer les articulations afin que le danseur évite de se blesser. « Ce cours de chauffe est très important, un peu comme pour les athlètes », continue-t-elle.
Ce métier accompagne l’artiste au quotidien et influence aussi sa vie privée. « On ne peut pas sortir jusqu’aux petites heures. On doit respecter son corps », ajoute Mme Elena. Une alimentation équilibrée afin de nourrir les muscles est essentielle. Le sommeil est aussi très important. Une hygiène de vie quotidienne est donc primordiale.
Être danseur, c’est aussi faire face à certaines injustices et donc faire preuve de détachement, mais pas trop, sinon un chorégraphe ou un directeur de compagnie peut penser que le danseur n’est pas assez impliqué. D’après Mme Elena, « il faut trouver un équilibre ».
Les danseurs professionnels et en particulier les danseurs classiques font aussi face à des aléas comme le caractère éphémère de leur carrière. « C’est une des contraintes, et pas des moindres, par rapport aux autres métiers artistiques », a souligné la conférencière.
Dès le début de sa carrière, le danseur sait très bien qu’il devra changer de profession. Anna Elena soulève ainsi plusieurs problèmes : parmi eux, le fait que les danseurs soient mal informés et qu’il n’y ait pas d’accompagnement sur ce sujet est préoccupant. « On n’en parle pas du tout pendant notre formation et tout au long de notre carrière », précise-t-elle.
Le résultat est que les danseurs ne pensent donc pas assez tôt à se reconvertir. Cela reste un sujet tabou. À partir d’un certain âge, il faut donc penser à changer de métier. « Pour les danseurs classiques, dans la quarantaine, il faut penser à faire autre chose. Je pense même avant », estime l’ancienne danseuse.
Pour certains, cette réalité est acceptée. C’est le cas d’Anna Elena qui a commencé à enseigner la danse classique. « J’ai vécu pleinement et eu la chance de vivre des expériences formidables dans de beaux théâtres. Ça m’a suffi. C’est une vie très intense qui demande beaucoup d’investissements à la fois personnels, physiques et émotionnels. » D’autres n’y arrivent pas et repoussent le moment de prendre « leur retraite de danseur ».
Mais pourquoi Anna Elena parle-t-elle de vie ininterrompue? « Il y a cette continuité dans l’après qui s’installe. » Certains danseurs vont se tourner vers la chorégraphie, ce qui est assez rare. D’autres vont se tourner vers l’enseignement de la danse, ce qui n’est pas facile. « Il faut un diplôme. La transmission, c’est tout un art. Il faut quitter son enveloppe de danseur pour se mettre à la place et au service des étudiants », explique Mme Elena.
Être danseur, ce n’est pas juste un métier et Anna Elena l’a montré tout au long de cette conférence. La danse accompagne l’artiste au quotidien!
PHOTO: Anna Elena