Richard Caumartin

La 30e édition du Salon du livre de Toronto (SLT) prenait son envol le 2 mars à l’Université de l’Ontario français (UOF). Le thème choisi cette année était « Lettre à la Terre ».

« Lettre à la Terre se veut à la fois une célébration de la beauté et de la richesse de notre planète; mais ce thème évoque également les menaces qui veillent au niveau des problèmes écologiques et des guerres et disputes qui semblent s’amplifier un peu partout. Le thème évoque également l’idée de la terre ancestrale, c’est-à-dire les lieux d’habitation traditionnels des francophones et la géographie qui continue à marquer leur identité », explique le président de l’organisme, Valéry Vlad.

Le cocktail d’ouverture a débuté avec un mot de bienvenue de Valéry Vlad qui en a profité pour présenter son conseil d’administration et l’équipe de gestion du SLT, soit Paul Savoie à la direction, Jacques Charrette à la logistique et Jean Martin aux communications. Il a également confié à l’auditoire que son équipe a fait face à un défi de taille cette année puisqu’une convention des compagnies minières se tient en même temps à Toronto. Par conséquent, le coût des chambres d’hôtel dans la Ville reine a quadruplé, ce qui a amputé le budget promotionnel du SLT.

Ont suivi les discours de Pierre Ouellette de l’UOF et de Daniel Bonin du Bureau du Québec à Toronto. M. Ouellette a confirmé que le SLT avait conclu une entente de cinq ans pour la tenue du Salon à l’UOF. Le comédien Guy Mignault a ensuite pris la parole. « Lorsqu’on m’a demandé d’être le président d’honneur de cette 30e édition, j’étais très touché et heureux. Toronto me manque, Montréal n’est pas pareille, il y a beaucoup trop de neige et de cônes oranges », dit-il avec humour.

Puis, l’ancienne présidente d’honneur, Anastasia Baczynskyj de la Ukrainian National Federation (UNF) de Toronto s’est adressé au public. Elle est directrice de UNF rare book and Archive Collection, une association qui veut sauver des livres ukrainiens rares et qui a obtenu le soutien du SLT l’an dernier.

« Grâce à la générosité des participants du Salon l’an dernier, nous avons pu acheter 50 boîtes sans acide, confirme Mme Baczynskyj. Vous avez assuré la préservation de plus de 500 livres rares, et je vous en remercie. En reconnaissance de ce don, chaque boîte portera l’inscription « Don du Salon du livre de Toronto 2022 » pour que tout le monde puisse voir la véritable amitié qui existe entre la communauté ukrainienne et la communauté francophone de Toronto. »

Elle n’a ensuite pu contenir ses émotions et a versé quelques larmes en affirmant que la Russie est déterminée à détruire les Ukrainiens, leur histoire, leur culture et leur langue. « Les soldats russes ont détruit plus de 122 bibliothèques, y compris des archives importantes et irremplaçables situées à Kharkiv et Chernihiv. Ils ont particulièrement ciblé des entrepôts avec des livres et des imprimeries. Ils ont détruit 2000 écoles et établissements d’enseignement. Ils ont volé des enfants ukrainiens pour les « rééduquer » en Russie, expliquant que leur niveau de langue russe est faible et doit être corrigé », conclut-elle.

Suite à cette intervention, Guy Mignault a lu un poème du plus grand héros de l’Ukraine, Taras Shevchenko, un serf ukrainien contraint à l’esclavage par le système féodal russe au XIXsiècle. Il a inspiré et continue d’inspirer une nation avec ses paroles « parce qu’elles résonnent de vérité, surtout en temps de guerre ». L’auditoire du Salon a été très ému par cette intervention et a réservé une ovation d’une minute pour Mme Baczynskyj.

Après toutes ces émotions est venu le temps de remettre le prix Alain-Thomas, d’une valeur de 2000 $ et qui récompense l’excellence littéraire en Ontario français. Ce prix est subventionné conjointement par l’Association des auteures et des auteurs de l’Ontario français (AAOF) et par le SLT.

Parmi les 22 candidatures reçues, le jury du SLT a choisi les trois ouvrages finalistes, soit Capharnaüm de Nancy Vickers, Mégane et Mathis d’Hélène Koscielniak et Amours jaunies suivi de Miscellanées d’Elsie Suréna.

C’est Mégane et Mathis qui l’a emporté. Sous la plume fluide d’Hélène Koscielniak, le roman contient des thématiques graves qui touchent une partie importante de la population. « Et s’il y a une chose que la littérature devrait bien faire, c’est de nous faire comprendre la perspective de l’autre. La force du roman est justement sa capacité à nous faire entrer dans le monde de chaque personnage ainsi que dans sa psychologie. Dans son récit, l’auteure aborde la question de l’anorexie, de la mauvaise influence des médias sur les jeunes ainsi que du stress que les disputes entre parents peuvent avoir sur leurs enfants », explique le directeur du Salon, Paul Savoie.

Le directeur général de l’AAOF, Yves Turbide, a présenté le chèque à Mme Koscielniak, accompagné de Paul Savoie et de Valéry Vlad. Les participants à cette soirée de lancement ont ensuite été conviés à un cocktail et à visiter le site du Salon qui est resté ouvert au public jusqu’au 5 mars.

Photo : De gauche à droite : le directeur général de l’AAOF, Yves Turbide, présente le chèque à Mme Koscielniak, accompagné de Paul Savoie et de Valéry Vlad.