Oasis centre des femmes, en partenariat avec Reflet Salvéo, invitait la communauté à s’attaquer aux questions liées à la violence systémique lors d’un forum intitulé Le Café urbain. Tout au long de la journée, des intervenants représentant différents systèmes institutionnels prenaient la parole pour débattre et dénoncer les injustices résultantes de la re-victimisation des femmes par le biais de divers systèmes – juridique, social et éducatif.
C’est en s’appuyant sur l’ouvrage du philosophe français Michel Foucault, Surveiller et punir, qu’Ali Liénaux, psychothérapeute et directeur adjoint du Centre francophone définissait l’exclusion.
Tel un hexagone, la société serait régie et délimitée à chaque coin par des gendarmes bien précis : la santé, l’éducation, l’armée, la discipline, la prison et la santé mentale.
« On est tous devenus les propres gendarmes de notre propre comportement », déclarait le psychothérapeute. Chaque individu est surveillé par ces systèmes dont il est sous l’influence afin de se policer lui-même. L’individu peut-être dans l’hexagone, à la marge de l’hexagone ou enfin en dehors de l’hexagone. Ce système créant ainsi une catégorie de personnes
« qui n’ont plus le droit d’être là »,
expliquait Ali Liénaux.
Cette marginalisation induite, comme la violence systémique, devait être prise dans une optique du genre lors du forum Le Café urbain. On parle bien de violence systémique faite aux femmes.
« Il faut approcher la violence systémique dans une perspective féministe intersectionelle », annonçait Carole Boulebsol, sociologue à la Concertation des luttes contre l’exploitation sexuelle, qui rappelait que les bases mêmes de nos sociétés étaient patriarcales – ce n’est, par exemple, qu’en 1928 que la Cour Suprême reconnaît le statut de personne aux femmes.
« Il faut parler patriarcat, il faut parler sexisme, il faut parler classisme », martèle
Carole Boulebsol, en ajoutant :
« Le groupe dominant a intérêt à rester dominant. C’est tout le jeu de la domination et des groupes privilégiés. »
La sociologue reconnaît également plusieurs domaines constituant la matrice des oppressions. Parmi ces domaines, le domaine structurel – représenté par la loi ou les différents systèmes gouvernementaux : c’est-à-dire quand la violence systémique est soutenue par un système devenu « complice ». Cette oppression est cependant davantage due à une méconnaissance qu’à une mauvaise volonté. « On est dans un système très axé sur le quantifiable. Il faut aller vite. Par manque de responsabilité sociale, on va mettre en place des actions qui sont davantage victimisantes que soutenantes. »
Le domaine hégémonique, c’est-à-dire la place de l’imaginaire, a aussi son rôle à jouer.
« Quand on parle de drame familial au lieu de parler de crime. Quand on parle de chicane au lieu de dire violence. Je crois qu’il est important de nommer les choses comme elles le sont. »
La notion de violence inclut la notion de lutte et, dans ce cas, de lutte de pouvoir. Un pouvoir qui engendre exclusion et marginalisation. L’analyse du pouvoir se posant donc comme un enjeu dans la lutte contre la violence faite aux femmes. « La violence masculine faite aux femmes », rappelait Carole Boulebsol. Le pouvoir étant détenu par « l’homme blanc ».
Photo: De gauche à droite : Aissa Nauthoo, directrice de la Clinique juridique du Centre francophone, Dada Gasirabo, directrice d’Oasis centre des femmes, Josée Roy, agente de planification à Reflet Salvéo, Marlène Thélusma Rémy, présidente de Reflet Salvéo et Carole Boulebsol, sociologue à la Concertation des luttes contre l’exploitation sexuelle (CLES)