Après les programmations jeunesse en mars et Spécial Québec en avril, le volet grand public du 20e festival Cinéfranco ouvre ses portes du 6 au 12 octobre, à Toronto.
Seize comédies francophones sont à l’affiche, dont plusieurs premières nord-américaines. C’est le cas de Marie-Francine, un Tanguy moderne, version féminine, avec devant et derrière la caméra une Valérie Lemercier grinçante et attachante.
Le spectateur devra savoir saisir le bonheur avec Guillaume Canet dans Rock’n Roll, tuer de sang-froid avec Romain Duris dans Un petit boulot, sauver un théâtre de la faillite avec Édouard Baer dans Ouvert la nuit, sortir vivant d’une voiture incontrôlable avec José Garcia dans À fond, ou former une famille unie avec Patrice Robitaille dans Les Trois P’tits cochons 2.
Naviguant entre les genres romantique (Les Ex, Embrasse-moi), satyrique (9 le film), dramatique (Primaire, Je suis à vous tout de suite, Un profil pour deux) et burlesque (Bienvenue au Gondwana, Raid dingue, Paris pieds nus), l’édition 2017 réussit le pari de l’éclectisme malgré un budget très réduit.
« Ce sont souvent des films qui ont du potentiel, mais qui ne trouvent pas leur marché. On parvient alors à s’entendre sur un prix, entre 150 $ et 2200 $, avec le diffuseur pour le mettre au programme du festival et atteindre un public qu’il n’aurait peut-être jamais touché », explique Marcelle Lean, qui veille à établir une sélection qui reflète la francophonie dans toute sa diversité. Le public appréciera ainsi des productions canadiennes, françaises, mais aussi des coproductions franco-belges, marocaines ou encore ivoiriennes.
Certaines seront projetées en présence de leur réalisateur, à l’image de Claudia Hébert dont le film, Les deuxièmes, fait partie d’une série de six courts-métrages projetés le 11 octobre.
En équilibre précaire l’année dernière, le festival avait bien failli disparaître des écrans radars torontois. C’était sans compter la résistance de Mme Lean. « Certains commanditaires nous ont lâchés, d’autres ont voulu changer la nature de l’événement… Malgré ces coups bas, on s’est accrochés en s’appuyant sur des bénévoles indéfectibles et un public fidèle. Beaucoup de cinéphiles nous ont aidés en signant une pétition et en faisant des dons. Une année, nous avons reçu un don personnel de 10 000 $ avec pour consigne de continuer coûte que coûte. »
Des marques de solidarité qui incitent la petite équipe de programmateurs à pérenniser sa mission culturelle entamée il y a 20 ans. « On est partis de rien. Dans les années 1990, le cinéma français était un mythe, réservé à l’élite et aux intellectuels. On nous parlait sans cesse d’une nouvelle vague qui n’atteignait jamais le rivage canadien. Avant de s’attaquer aux films d’auteur, il fallait populariser ce cinéma, à travers des œuvres accessibles : les comédies. La programmation s’est ainsi enrichie d’année en année, servant de tremplin à plusieurs réalisateurs… jusqu’en 2015 où nous avons perdu une importante subvention. »
Loin de baisser les bras, la directrice établit de nouveaux partenariats et généralise les co-présentations pour attirer un public plus large et donner plus de visibilité aux réalisateurs émergents. Elle espère rebâtir à terme un programme grand public tel qu’il était à son apogée – une trentaine de films projetés dans une salle de 600 places. « On repart à zéro et il y a beaucoup d’incertitudes, concède Marcelle Lean. Mais on a la chance extraordinaire de connaître un succès sans précédent avec le programme jeunesse qui gagne chaque année un millier de spectateurs supplémentaires. Au total, 8500 élèves et enseignants ont assisté aux projections en mars dernier. Un record. »
Ce jeune public à qui nous donnons le goût d’aller au cinéma sera le grand public de demain, anticipe Mme Lean qui croit aux vertus du grand écran : « Le cinéma francophone nous unit par une langue et une histoire communes. Ce n’est pas seulement un outil de divertissement, c’est aussi un moment de partage et de construction de son identité profonde. »
Photo (Unifrance) : José Garcia et André Dussolier dans À fond.