L’Alliance française de Toronto a proposé un webinaire informatif sur l’art de ce monde. L’excellente guide Ophélie Delacour, une passionnée d’art et de culture, est de retour pour un plongeon au cœur du monde Duchamp.

Diplômée en médiation culturelle à l’École du Louvre, à Paris, elle a travaillé comme guide touristique dans différents quartiers de Paris; puis, en 2019, elle a rejoint l’Alliance française de Toronto.

« Marcel Duchamp est l’un des plus grands pionniers de l’art contemporain tel qu’on le connaît aujourd’hui, avec son lot d’humour, de bizarrerie et de choses incompréhensibles qui font parfois franchement lever le sourcil », déclare en introduction Mme Delacour. L’artiste farfelu est connu pour son art cinétique; des sculptures en mouvement qui invitent son public à visionner le tout avec des yeux d’enfant.

À ses débuts, M. Duchamp ira étudier à l’Académie Julian. « C’est un contexte très ouvert d’esprit pour prendre ses premiers pas. L’école ne requiert pas de test de langue et accepte les femmes », explique Mme Delacour. Il est clair que M. Duchamp n’aime pas suivre les normes. « L’avant-garde l’intéresse beaucoup et il développe même son propre style de cubisme, une sorte d’avant-garde cubiste », partage-t-elle.

D’ailleurs sa première toile célèbre – Nu descendant l’escalier – est un exemple frappant de sa bizarrerie. « Son personnage nu n’a rien d’humain, il est mécanique, robotique, très différent des corps nus de l’époque », affirme la guide.

La toile semble aussi illustrer le mouvement de l’être qui descend l’escalier, comme si M. Duchamp avait voulu utiliser un médium immobile pour dépeindre une action. La toile est un succès à New York, mais est vite rejetée à Paris.

Puis, vient l’urinoir, probablement son œuvre la plus célèbre. M. Duchamp place un urinoir à l’envers et le baptise Fontaine, le signant R. Mutt.

Avec cette œuvre il se lance dans le ready-made et définit l’art concept. Cependant, la galerie où il se retrouve en exposition ne semble pas très enchantée de l’œuvre. Fontaine se retrouve placée carrément derrière une plante.

« Duchamp publiera donc à sa suite un papier explicatif, le seul de sa part, pour en quelque sorte défendre son œuvre », ajoute Mme Delacour. Certains voient aussi l’œuvre comme une sorte de début au pop art, mouvement rendu célèbre par Andy Warhol des années plus tard.

C’est à ce tournant de sa vie que l’artiste s’approche de plus en plus du mouvement Dada, qui se veut libre des normes esthétiques et artistiques.

Il sortira ensuite L.H.O.O.Q, ou en lecteur rapide qui devient elle a chaud au cul. Il rajoute une moustache et une barbe à La Joconde.

Selon certaines thèses, le modèle de La Joconde aurait effectivement été un homme, c’est peut-être la source d’inspiration de l’artiste qui, lui-même fluide dans son genre, change volontiers d’identité à l’époque. Il choisit le pseudonyme de Rrose (avec deux « r ») Sélavy et se fait photographier en femme.

Souvent, les œuvres de Marcel Duchamp veulent étonner le public de ce qu’il voit et ce qu’il en pense. « Il crée un décalage entre l’œuvre et son titre par exemple », explique Mme Delacour. Même dans son œuvre finale Étant donné, qui est dévoilée après sa mort, le public en devient partie intégrante alors qu’il s’avance pour observer la toile.

Vers la fin de sa vie, Duchamp s’autoproclame anti-art. Il a voulu jusqu’à la fin toujours repousser l’enveloppe culturelle de son époque.