Pour un pape que l’on disait conventionnel, conservateur et austère, Benoît XVI a surpris son monde. Un des rares papes allemands de l’histoire tumultueuse de la papauté est le premier pape à abdiquer depuis 1415. Grégoire XII avait alors abdiqué pour faciliter la fin du Grand schisme qui déchirait l’Église.
Tandis que Jean-Paul II, qui avait songé à renoncer, avait persévéré jusqu’au bout de la maladie, Benoît XVI a posé un geste qui devrait changer la gouvernance de l’Église catholique romaine.
Humblement, le pape va finir ses jours dans un monastère du Vatican, dans la prière et l’étude, qui ont toujours mieux convenu à ce travailleur érudit que les voyages incessants, les messes gigantesques en plein air et les accueils de rock star, qui le fatiguaient plus qu’ils ne le galvanisaient. Peu à l’aise dans la communication, il a enchaîné quelques bourdes au sujet de l’Islam, ainsi qu’au sujet du préservatif, qui favoriserait selon lui la propagation du VIH.
Pour l’abbé Justin Desroches, curé de la paroisse Sacré-Cœur de Toronto, « c’est une bonne décision de sa part. On a parlé de cette situation lors du dernier conclave, lorsque le pape Jean-Paul II était sérieusement malade. » Pour l’abbé Justin, « si cette décision est réfléchie et si c’est pour le bien de l’Église, c’est quelque chose que l’on devrait faire tous les 10 ans! »
Le curé de la paroisse Sacré-Cœur de Toronto n’a « pas beaucoup de souvenirs personnels » de Benoît XVI. Il se souvient plutôt de la venue de Jean-Paul II à Toronto pour les Journées mondiales de la jeunesse, en 2002. « Je me souviendrai de Benoît XVI comme quelqu’un qui a réussi à établir un lien entre la théologie et l’évangélisation », ajoute-t-il.
Comme dirait Prévert « un nouveau pape est appelé à régner ». La stupéfaction de l’annonce passée, les couloirs du Vatican, les réseaux en ligne et les rédactions de journaux bruissent des nombreuses rumeurs sur la succession du prélat. Les derniers choix du souverain pontife sont scrutés : le transfert du cardinal Scola de Venise à Milan, deux diocèses célèbres pour leurs nombreux évêques devenus pape; sa célèbre phrase sur l’heure prochaine d’un pape africain, sa désignation d’un jeune cardinal philippin, et surtout, l’appel à Rome du cardinal Marc Ouellet.
« Marc Ouellet, ce n’est pas un avant-gardiste, mentionne l’abbé Justin Desroches. Mais tout dépend de ce que l’on veut pour l’Église. »
Il faut rappeler que le cardinal Ouellet n’a pas laissé un souvenir impérissable au Québec où on lui a reproché son intransigeance, notamment vis-à-vis de l’interruption volontaire de grossesse, qu’il a qualifiée de « crime ». Quoi qu’il en soit, son expérience en Amérique latine pèse en sa faveur, de même que son statut de Nord-Américain, de conservateur et de polyglotte. Le prélat parle en effet huit langues.
Il peut se dérouler plusieurs semaines pour que le conclave prenne sa décision. Celle-ci est cependant attendue pour Pâques. Les preneurs de paris britanniques sont déjà sur les dents. Marc Ouellet est bien placé.
Photo : Benoît XVI a surpris son monde.