Étienne Lajoie
Souhaitant approfondir sa compréhension des enjeux touchant les nouveaux arrivants francophones en situation minoritaire, des chercheurs lanceront prochainement un Observatoire sur l’immigration francophone. Celui-ci pourrait, dès novembre, devenir une plateforme de diffusion des connaissances en matière d’immigration francophone.
À son arrivée à l’Université de l’Ontario français (UOF) en 2019, la professeure Linda Cardinal a amorcé de vastes consultations auprès de plusieurs organismes francophones en contexte minoritaire pour déterminer quels créneaux de recherche devait développer l’université.
« Il ne fallait pas s’étonner que le thème de l’immigration ressorte », dit celle qui mène le projet de l’observatoire.
« Nous avons besoin de plus de données et d’information sur l’immigration francophone en situation minoritaire », lui a-t-on dit.
La création de l’observatoire vient répondre à cette demande, affirme Amin Moghadam, un chercheur franco-iranien membre de la Chaire d’excellence en recherche du Canada sur la migration et l’intégration (CERC), à l’Université métropolitaine de Toronto. Le CERC est devenu le partenaire officiel de l’observatoire après que Linda Cardinal a contacté sa directrice, la professeure Anna Triandafyllidou.
Comme le demandaient les organismes consultés, l’observatoire aura des fonctions multiples. Il servira à professionnaliser le milieu communautaire grâce à des ateliers éducatifs et à nourrir le débat public. Les chercheurs feront circuler des données et prépareront des documents qui permettront de dire aux gouvernements qu’ « il y a peut-être un angle mort, ici », donne en exemple la professeure Cardinal. « C’est d’accompagner les interventions des acteurs politiques, d’avoir un rôle de consultant, presque », illustre Amin Moghadam.
Le chercheur francophone du CERC – l’un des quatre s’exprimant en français au sein de la chaire – veut aussi comprendre davantage la réalité des migrants francophones et leur intégration au Canada.
Amin Moghadam s’intéresse, notamment, à l’accès à la propriété. L’observatoire pourrait, par exemple, analyser si la maîtrise ou l’absence de maîtrise d’une langue a un effet sur la trajectoire résidentielle des migrants. « Il faut qu’il y ait cette volonté et ambition de prendre en compte les dimensions variées d’un phénomène », dit-il.
L’inauguration de l’observatoire à l’automne pourrait se faire quelques semaines ou mois après l’adoption du projet de loi C-13, qui modernisera la Loi sur les langues officielles. Lorsque ce projet de loi sera adopté, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration aura la responsabilité de développer une politique en matière d’immigration francophone, entre autres. Linda Cardinal y voit un endroit où l’observatoire pourrait avoir un impact. « On espère qu’un observatoire comme le nôtre pourrait contribuer à réaliser cet objectif », explique la professeure de l’UOF.
Pour l’instant, l’observatoire attend du financement de la part d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), le ministère qu’il souhaite aider dans le cadre du projet de loi C-13. Les chercheurs ont fait une demande de financement de 350 000 $ au ministère. L’observatoire aimerait embaucher du personnel pour assurer la coordination du groupe de chercheurs et s’occuper des communications, indique la professeure Cardinal. Le groupe aimerait aussi signer des partenariats pour des projets de recherche, dit-elle.
« Les instigateurs du projet ont pu présenter la nature, les objectifs et les retombées attendues de l’observatoire. Ce fut l’occasion d’identifier les points de convergence et les occasions de collaborations potentielles », affirme une porte-parole d’IRCC.
« IRCC fera un suivi avec les représentants de l’observatoire en temps opportun pour discuter de la suite des choses. »
Source : La Presse canadienne / Ce reportage bénéficie du soutien de l’Initiative de journalisme local, Le Droit, financée par le gouvernement du Canada.