Lorsque les pays d’Afrique du Nord ou du Moyen-Orient sont évoqués, difficile de ne pas aborder rapidement la violence et l’extrémisme religieux qui y règnent aujourd’hui. Pourtant, au-delà de ce voile noir que certaines personnes utilisent parfois pour résumer ces régions du monde, une autre approche est possible, plus lumineuse, plus optimiste. C’est cette optique que l’artiste montréalaise d’origine algérienne Nadia Seboussi met en avant jusqu’au 26 septembre à la galerie Whippersnapper, située au 594b, rue Dundas Ouest.
C’est en 2013 que le projet Il était une fois l’Orient a vu le jour. « J’ai réfléchi à la tenue en Afrique du Nord, dit Mme Seboussi. Les changements vestimentaires sont significatifs du contexte socio-politique. » Débutant toujours d’une particularité locale avant de se diriger vers une problématique globale, l’artiste souhaite « déconstruire les clichés de l’orientalisme, de l’arabe et du musulman » en se focalisant sur la féminité orientale. « Ça a effet négatif sur ce qu’on est, ajoute-t-elle. Je voulais questionner la place de la femme et j’ai choisi le vêtement. J’ai commencé avec le voile. »
Pour se faire, elle a utilisé des images du cinéma égyptien de l’âge d’or puis a demandé à plusieurs Algériennes qui étaient adolescentes dans les années 1950-60 de désigner plusieurs changements opérés entre cette époque et les temps modernes. « J’ai choisi Lawrence d’Arabie et La Bataille d’Alger puis j’ai créé mes images, confie-t-elle, des femmes révolutionnaires qui se déguisent en Occidentales, un train avec des chevaux qui symbolise les libertés. »
Selon elle, que l’on soit d’un côté ou de l’autre, on se retrouve toujours du mauvais bord lorsqu’il faut parler d’orientalisme. La femme, quant à elle, est dans ces sociétés constamment jugée pour ses actes par rapport au péché originel, même si elle est en souffrance dans toutes les cultures. « Je suis de la nature des chercheurs, poursuit-elle. Je pars d’un postulat pour arriver à un constat. Je cherche à convaincre les visiteurs et je suis très exigeante. Nous avons une responsabilité quand nous produisons une image. Si ça a déjà été fait, pourquoi le refaire? »
Ne travaillant jamais seule, Nadia Seboussi collecte différents symboles qui permettraient de changer la perception du quidam. « Nous n’arrivons pas à nous identifier à l’identité qui nous est donnée. C’est un processus de rejet de cette identité. Je considère cela comme une forme de colonisation par l’image. »
Courtes vidéos représentant un homme en tenue religieuse qui fait la danse du ventre, une femme voilée au regard énigmatique ou un cheval blanc à la crinière apaisante, les œuvres de Mme Seboussi comble à merveille le petit espace qui leur est alloué.
Elle exposera de nouveau en novembre prochain à Montréal, en se focalisant sur le deuil et les femmes qui se sont battues en Algérie et en Syrie. Sa problématique étant le déplacement de populations, elle a travaillé sur 40 ans de photojournalisme et s’attarde sur les postures représentant la douleur.
Photo: L’artiste Nadia Seboussi (à gauche) présente ses oeuvres.