Du 21 au 23 février, The Art Project a rassemblé des centaines d’exposants et des milliers de visiteurs amateurs d’art. 

Les artistes vous le diront tous : exposer son art est une des choses les plus difficiles du métier. Certains adorent cependant le contact avec le public après les heures solitaires dans l’atelier. Lire dans les yeux l’émerveillement des juges ultimes, les spectateurs. D’autres redoutent les commentaires embarrassants, les comparaisons malheureuses avec d’autres artistes et les mots compliqués lâchés d’un ton naturel « positivisme », « expressionnisme », « essentialisme », qui sonnent faux.

Lors d’une foire de l’art, à l’image de The Art Project, qui a lieu chaque année, ces moments sont décuplés. Des milliers de visiteurs déambulent devant des centaines d’artistes exposant des milliers d’œuvres. Tableaux, peintures, sculptures, design, photographie, etc. Tout ne peut pas plaire à tout le monde. Tout ne peut pas non plus se valoir. Les œuvres sont aussi éclectiques que disparates. 

Il découle de cette situation un moment précis, gênant, autant pour l’artiste que pour le spectateur. Celui où le chaland arrive devant un kiosque, pensant qu’il aimait les œuvres, qui de loin, lui paraissaient belles et qui, de près, s’avèrent décevantes. Un sourire sympathiquement gêné est échangé pendant une seconde de malaise.

Un malaise qu’on ne ressent pas devant les œuvres d’Éric Farache, artiste francophone de Toronto, aux origines marocaines. C’est d’ailleurs absolument l’inverse, qui se produit. Un sentiment d’aise, de soulagement. Un peu comme un bon souvenir qui reviendrait de façon impromptue. 

Éric Farache s’est fait sa réputation avec ses dessins et ses peintures. Aujourd’hui, il surprend son monde avec des photographies. Mais le lien est évident, de même que la principale interrogation de l’artiste : le temps. Le temps qui glisse, qui n’est déjà plus, mais qui bouscule les roses en passant. Farache essaye de garder le plus longtemps possible certains moments. Une quête d’éternité perdue d’avance, on ne garde pas une poignée de sable dans sa main très longtemps.

Ainsi, ces hommes, sur une dune saharienne, qui regardaient le soleil se coucher. Le cliché dure. L’impression d’intemporalité vaine est tenace, ce moment n’est plus qu’un souvenir d’artiste, et une photo. Mais ce moment est un bon moment, un moment d’émotion et de recueillement. Et c’est ce que l’on retient aussi.

En déambulant parmi ces centaines d’artistes qui ont mis parfois toute leur âme, on trouve de quoi s’ébahir. C’est le grand bonheur du Art Project.

Photo : Éric Farache