Désormais bien implantée dans le calendrier local de la Ville reine, la Nuit blanche est de nouveau tombée le samedi 3 octobre au soir. Expositions, concerts, théâtre… la scène culturelle a brillé de mille feux grâce à l’apport de nombreux artistes canadiens et internationaux. Parmi eux, plusieurs francophones au talent indéniable.

Collaboration entre la France et les États-Unis, Les travaux du Parisien JR étaient répartis à quatre endroits de Toronto. Les photographies issues de Les Bosquets se trouvaient au Design Exchange, l’installation vidéo The Eyes of the Bridge au coin des rues Bay et Front, les regards immortalisés des passants de Your Eyes Inside Out à la maison Campbell et la cabine photographique géante d’Inside Out à l’hôtel de ville. Par le biais de ce dernier, il a offert aux Torontois, comme à une trentaine de villes auparavant, de prendre une photo d’eux et de la coller sur le sol, afin d’obtenir une sorte de mosaïque aussi imprévisible qu’étonnante.

Autre collaboration mais cette fois-ci entre l’Angleterre et la France avec Beaufort 9 : Requiem for Harley Warren (Screams from Hell) de la Française Marguerite Humeau. Une installation qui prétend retranscrire la voix de la terre par le biais de sons émanant de fissures de la croûte terrestre. 

L’exposition Empreintes de l’artiste Pascale Peyret située dans le hall du musée de la chaussure Bata constituait l’un des points forts de cette soirée pas comme les autres. En effet, cette installation atypique montrait des centaines de formes à chaussure carbonisées, pendues au plafond. 

Plasticienne et photographe, Mme Peyret est fascinée par le lien au vivant pour son aspect fondateur. « Mon travail sur les gens s’insinue vraiment dans la mémoire. L’idée m’est venue lorsque j’ai vu que l’on avait découvert des empreintes de pas en Éthiopie vieilles de 3000 ans. Ça m’a inspirée. » 

Mais cette exposition s’inspire également de Samuel de Champlain, de la mémoire que les francophones ont pu laisser. Le procédé d’exécution fut en revanche très spécifique. « J’ai récolté des formes de chaussures en bois, puis je suis allée dans le sud de la France voir le charbonnier Martial Acquarone qui a transformé ces formes en charbon », explique-t-elle. 

L’œuvre en elle-même s’identifie à un mouvement animalier naturel. « Je me suis inspirée des nuées d’oiseaux et j’ai utilisé le procédé de carbonisation partielle à 274 degrés, ajoute-t-elle. Les formes sont devenues noir mat. »

Habituée des Nuits blanches, elle découvre véritablement à Toronto la vigueur de la langue française. « En Ontario, j’ai observé que la francophonie était très vivante », dit-elle. Quant aux réactions du public devant son travail, elles sont plus qu’encourageantes. « Les gens me disent que c’est un travail sensible. Ce sont souvent des assemblages très simples, confie-t-elle modestement. La mise en œuvre est très importante pour moi, la façon dont on l’a faite avec le charbonnier. C’est un processus aussi important que le résultat. »

Une 10e édition haute en couleur qui a convaincu une foule nombreuse et friande de découvertes culturelles de premier ordre.

Photo: Une nuée de formes à chaussure signée Pascale Peyret