À une époque où la mobilité n’a jamais été autant d’actualité, le Centre de recherches en éducation franco-ontarienne (CREFO) tenait, le mercredi 3 décembre, une conférence visant à questionner les nouvelles formes de migration au sein des écoles françaises de la province. La conférencière et ancienne directrice du CREFO, Diane Farmer, est professeure agrégée en sociologie et enseigne à l’Université de Toronto tout en menant ses recherches.
La conférence est le résultat d’études ethnographiques qui nous plongent dans la francophonie minoritaire, l’enfance et la jeunesse. Le but de la chercheuse est d’offrir un regard conceptuel sur les nouvelles formes de mobilité et l’expérience scolaire. Dans quelles mesures l’école se pose-t-elle comme un point de repère? Quel est le lien entre les écoles, la mobilité et la structure d’ancrage? Tout comme « une rivière et ses rives », comment continuité et changement cohabitent-ils?
Pour ce faire, Diane Farmer est partie de l’idée d’une recherche avec les jeunes plutôt que sur les jeunes. En utilisant le dessin réflexif, elle a travaillé avec trois écoles françaises : une école d’immersion, une école publique et une école privée. Les enfants sont amenés à créer des « portraits de langues ». En d’autres mots, à mettre en couleur leur propre image digitalisée, selon leur relation aux différentes langues. Les enfants dessinent sur leurs corps, chaque portrait ayant un agencement de couleurs et de légendes.
Ainsi, Christopher, 10 ans, d’origine libanaise et né en Ontario, colorie son visage en vert « pour le Liban » et appose également du rouge sur ses vêtements pour le Canada, car il y est né et « dans le drapeau canadien, il y a beaucoup de rouge ». Véronique, 15 ans, colorie son effigie par strates : née dans le sud de la France, elle colorie son cœur et ses pieds en vert pour montrer son amour et ses racines. Le bleu, sur sa tête, représente le français, car elle « pense en français ». Le rouge, qui grimpe sur ses jambes, est l’anglais qui « vient petit à petit ». Elle laisse une partie de son corps en blanc « pour les cultures à venir ».
Les enfants, à travers leurs dessins montrent, avant tout, les liens d’affection, d’identité mais également des rêves futurs. Plusieurs éléments ressortent de cette étude. On remarque que coexistent mouvement et sédentarité mais également idées nationales et transnationales. Au cœur de cette mobilité, l’école se pose comme « les rives de la rivière » donnant un sens aux migrations. Une étude qui donne lieu à des réflexions intéressantes sur le rôle des écoles francophones en tant que structure d’ancrage pour des enfants face à une vie de changement.
Photo: Diane Farmer, professeure agrégée en sociologie à l’Université de Toronto