Vous arrive-t-il de ne pas pouvoir trouver le sommeil ou bien de vous réveiller au beau milieu de la nuit et de ne plus pouvoir vous rendormir? Si c’est le cas, vous faites alors partie du tiers de la population qui éprouve des difficultés à dormir.

Vous serez peut-être alors intéressé à participer au tout dernier projet interactif de l’Office national du film du Canada (ONF) Journal d’une insomnie collective. Au cours des deux dernières années, une équipe de créateurs a recueilli des témoignages de milliers d’insomniaques à travers le monde. À partir du jeudi 18 avril, chacun de nous pourra prendre rendez-vous avec un de ces insomniaques en se rendant sur le site Internet de l’ONF.

Par la suite, cette personne interrompra votre sommeil en pleine nuit en vous appelant sur votre téléphone portable. Elle vous invitera alors à vous rendre de nouveau sur le site et à découvrir le monde de l’insomnie en vous posant des questions. Le jour du lancement, une installation artistique sera montée à New York dans le cadre du Festival du Film de Tribeca. Les visiteurs pourront répondre aux mêmes questions en pénétrant dans une immense boîte noire.
Ce projet s’inscrit dans le nouveau « virage numérique » qu’a pris l’ONF il y a cinq ans. Depuis lors, plus de 2000 œuvres audiovisuelles sont maintenant disponibles sur le site Internet de l’ONF. On peut donc visionner ces films à travers le monde entier en utilisant un ordinateur, une tablette ou même un téléphone intelligent. L’ONF a de surcroît décidé d’aller encore plus loin en consacrant un quart de son budget pour des projets interactifs afin d’engager de façon active son public. Une quarantaine de ces projets sont déjà accessibles en ligne.

« Il s’agit d’une nouvelle grammaire que nous voulons bien maîtriser », déclare Monique Simard, directrice du Programme français à l’ONF, venue ce jour-là présenter le projet à la presse torontoise. Elle ajoute que l’insomnie est un thème qui épouse parfaitement un des buts de l’ONF qui est d’aborder les problèmes sociaux contemporains.

« On traite le public comme des acteurs. De cette façon, il enrichit et diversifie l’expérience », explique Hugues Sweeney, producteur du projet. Il avoue qu’il est surpris par la très grande franchise des témoignages recueillis jusqu’à présent. Selon lui, les gens semblent vouloir se livrer sans aucune gêne et réaliser en quelque sorte leur propre un « coming out ».

On constate que l’insomnie a des effets très néfastes, non seulement sur le bien-être des insomniaques eux-mêmes mais aussi sur celui de leurs proches. L’insomnie peut mener à la consommation de somnifères ou d’alcool, à une baisse de productivité et d’assiduité au travail et à des accidents de la route. Selon Guillaume Braun, un des deux directeurs de création du projet et insomniaque lui-même, la très grande majorité des insomniaques souffrent en fait d’anxiété ou éprouvent des difficultés à gérer le stress.

« L’insomnie est un symptôme, le signe d’un malaise qui réside dans notre société», affirme Guillaume. Il souligne cependant que le problème semble être apparu à l’avènement de la révolution industrielle au XIXe siècle. Avant cela, les gens pouvaient s’accommoder plus facilement d’un sommeil fractionné. Aujourd’hui, la grande majorité des gens doivent se plier aux exigences d’un horaire établi par l’employeur, en général huit heures de travail durant le jour.

« Nous ne savions pas à quoi nous attendre dans ce projet. D’ailleurs, nous ne savons toujours pas où nous nous en allons », reconnaît Philippe Lambert, responsable de la musique et de la conception sonore. Pour l’instant, seule la date du début de cette expérience est connue. Les créateurs eux-mêmes n’en connaissent pas l’issue. Qui sait, peut-être vous aussi ferez partie du projet!

Pour participer au projet à partir du 18 avril, consultez http://insomnie.onf.ca.

Photo : De gauche à droite : Guillaume Braun, Hugues Sweeney et Philippe Lambert, créateurs du projet-cor