Le luxe et la France, c’est d’abord un cliché. Le luxe, cet état d’esprit qui mêle qualité et rareté, abondance et superflu, ainsi qu’une certaine arrogance frivole alliée à un élitisme assumé, est au cœur de l’image de la France dans le monde. Au-delà du lieu commun, le luxe est aussi une industrie qui contribue en grande partie à l’économie et à l’attractivité de la France, poussée par de grandes marques telles que Hermès, Yves Saint Laurent, Louis-Vuitton, Saint-Gaubin, Channel ou encore Louboutin, Remy-Martin et Cartier, qui emploient énormément de personnes en France.

Chacune de ces marques, qui ont percé grâce à un produit phare (parfois deux), est un roman. Et c’est ce roman que raconte Laurence Picot, conférencière à l’Alliance française, le mercredi 28 mai. Comme tous les romans, celui-ci joue avec les mystères, les drames, les dénouements heureux et les destins hors du commun.

Le luxe en France commence ainsi avec la Galerie des Glaces du château de Versailles. Prouesse architecturale, et surtout, lubie d’un homme, Louis Dieudonné de Bourbon Capet, 64e roi de France, 44e roi de Navarre, et plus connu sous le nom de Louis XIV, le Roi Soleil ou Louis le Grand. Pour illuminer le monde, pour occuper les courtisans et les garder à l’œil, pour montrer la grandeur de la France, il fit cette galerie, sertie de centaines de miroirs. « L’équivalent pour l’époque, du PIB d’un pays », selon la conférencière. Pour ce faire, il enverra des agents capturer des verriers vénitiens de Murano. C’est le début de la manufacture royale de glaces et de miroirs de Saint-Gobain, entreprise toujours en pointe de la technologie aujourd’hui, et à qui on doit notamment le verre particulièrement transparent de la pyramide du Louvre, le verre-cristal.

La porcelaine européenne connaît une histoire similaire. Depuis toujours secret chinois aussi jalousé des Européens que bien gardé, il est découvert d’abord par un alchimiste de la cour du roi de Saxe et de Pologne, Frédéric le Fort, après avoir été enfermé dans un cachot, puis par un jésuite qui transmet le secret à Limoges… D’où les débuts de la fameuse porcelaine de Limoges!

Les parfums, mais aussi les sous-vêtements, avec le destin tragique et sublime d’Herminie Cadolle, communarde, amie de Louise-Michel, exilée en Argentine, et qui crée le soutien-gorge, libérant ainsi la taille des femmes, prisonnières jusqu’ici du corset. Depuis, la maison Cadolle, qui se transmet de mère en fille, dessine les silhouettes des grandes de ce monde. Actrices, mannequins, premières dames… 

Mais au-delà des anecdotes, on peut regretter que la conférencière n’ait pas eu le temps de questionner les ressorts du luxe. Pourquoi cette industrie est-elle florissante? Pourquoi certains achètent-ils des produits de luxe? Et surtout, à l’heure des crises économiques, des famines et des inégalités grandissantes, que signifie de dépenser l’équivalent de plusieurs dizaines de salaires moyens dans un soutien-gorge ou une paire de gants?

Photo : Laurence Picot