Le quartier général des organismes francophones de la Ville Reine pourrait ne pas voir le jour.
Le temps est compté pour le projet de Maison de la francophonie à Toronto, dit le président de son comité directeur, l’avocat Kip Daechsel.
Le groupe attend toujours des nouvelles de Patrimoine canadien, qui serait en mesure de financer une grande partie du projet par l’entremise du Programme d’appui aux langues officielles. Mais sans le soutien du ministère fédéral, évalué à environ 12 millions $, le projet risque de tomber à l’eau, dit M. Daechsel.
L’avocat et son équipe souhaitent que l’endroit devienne le quartier général des organismes francophones de la Ville reine, à l’image d’emplacements similaires situés à Edmonton et à Vancouver.
Le projet dit compter sur l’engagement de plusieurs locataires, dont la Société économique de l’Ontario (SEO) et l’organisme communautaire FrancoQueer.
Dans un courriel au Devoir, un porte-parole de la SEO note toutefois que le bureau torontois de l’organisation a fermé temporairement en juin 2021, et qu’« aucune décision n’a été prise quant à l’emplacement du futur bureau ». Aucun bail ne lie la SEO au projet en ce moment, mais l’avocat Daechsel affirme que d’autres locataires sont prêts à remplacer la société si elle se désiste.
L’organisme FrancoQueer, pour sa part, est enthousiaste à l’idée d’y emménager. « Nous pensons que cela faciliterait notre travail [de sensibilisation] avec les partenaires et la communauté », souligne le directeur général de l’organisme, Arnaud Baudry.
« Une entreprise immobilière est prête à vendre à un prix avantageux à la Maison de la francophonie un site situé à un jet de pierre de plusieurs ministères et de deux stations de métro, assure Kip Daechsel. Mais le temps presse et le financement fédéral traîne de la patte, insiste-t-il. Ils peuvent nous dire demain : « On t’aime bien, mais on a attendu trop longtemps et quelqu’un nous a offert deux millions de dollars de plus. »
Un projet de longue date
La Maison de la francophonie de Toronto est en gestation depuis des décennies. En 2014, le comité directeur avait récolté 200 000 $ pour le projet grâce à une soirée hommage à l’ancien premier ministre canadien Jean Chrétien, qui fêtait alors ses 80 ans. Mais malgré l’appui de plusieurs politiciens de différents partis et ordres de gouvernement, le financement institutionnel ne s’est jamais concrétisé.
Au printemps 2020, Patrimoine canadien a confirmé que le projet respectait les critères du Programme d’appui aux langues officielles, mais un an plus tard, le comité directeur attend toujours la décision finale du ministère fédéral. « L’analyse du dossier n’est pas encore terminée », précise-t-on du côté d’Ottawa.
« Nous suivons de près le dossier », a simplement déclaré une porte-parole de la ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney.
Les locataires
La liste des locataires potentiels de la Maison de la francophonie de Toronto a bien évolué au fil du temps. Le collège Boréal, la chaîne de télévision TFO, l’Université de l’Ontario français (UOF) : plusieurs ont montré de l’intérêt à l’égard du projet.
Dans un rapport publié en 2017, la présidente du Conseil de gouvernance de l’UOF, Dyane Adam, suggérait d’associer la nouvelle université au projet pour y installer des résidences étudiantes. L’idée avait aussi été proposée par la prédécesseure libérale de Caroline Mulroney aux Affaires francophones, Madeleine Meilleur, qui admet toutefois ne pas avoir suivi le dossier depuis son départ de la politique en 2016.
L’UOF ne compte toutefois pas construire de résidences étudiantes pour l’instant. « Ç’a été mis de côté, je ne sais pas où ils en sont », laisse tomber Kip Daechsel.
L’avocat espère maintenant que la ministre des Langues officielles, Mélanie Joly, encouragera son ministère à cesser de « niaiser avec la puck » et à donner le feu vert au financement du projet. « Ce serait triste [de voir un] gouvernement qui a de bonnes intentions par rapport à la francophonie [en milieu minoritaire] laisser tomber les franco-Torontois », dit-il.
SOURCE : Étienne Lajoie, La Presse canadienne