Depuis trois ans, le Département de français de l’Université de Toronto organise une conférence intitulée Feeling Queer. Un vaste sujet, qui a été débattu pendant trois jours, les 24, 25 et 26 mai par une quarantaine d’universitaires. Mais que signifie « être queer »? En français, il n’y a pas de traduction ni de définition officielle.
Jorge Calderón, l’un des trois organisateurs et spécialiste de ce sujet, explique en quelques mots qu’ « être queer, c’est échapper à la discipline sociale, résister à la norme, ne pas être hétérosexuel, ne pas être hétéronormatif, c’est-à-dire marié avec des enfants et habitant la banlieue. C’est essayer d’aller chercher l’affectivité particulière de chacun et résister à la discipline ou au dressage social qu’on a reçu ».
C’est un sujet qui intéresse de plus en plus de gens. Il était donc naturel pour l’Université de Toronto d’organiser cette conférence. Cette année, trois jours ont été consacrés à « l’affect », c’est-à-dire « l’affectivité, le corps, les sentiments, les sensations, les émotions » selon Jorge Calderón.
Est-ce facile d’être queer au XXIe siècle? Toutes les communautés et tous les pays acceptent-ils les queers de façon égale?
Pour Pascal Michelucci, « l’expérience queer est fortement liée aux affects. Quand on grandit homosexuel ou lesbienne, on vit avec la honte. On vit avec le rejet. On se hait soi-même, puis on apprend à s’accepter. Puis, il y a après tout ce mouvement de la fierté gay, le courage de sortir du placard ».
Il y a beaucoup de rejet, de lutte et de colère de la part des jeunes queers. Beaucoup sont jetés à la rue par leurs parents. Ils se retrouvent seuls et sont donc sujets à la dépression, au suicide. Ce sont des choses graves qui affectent les jeunes homosexuels. Ce n’est pas facile pour eux et la société ne les aide pas parfois à se sentir mieux et à être acceptés.
C‘est encore plus difficile pour les queers qui sont d’origine maghrébine et ceux qui vivent dans des pays telle la Tchétchénie.
Au cours d’une conférence de Denis Provencher, le conférencier a évoqué 2FIK, artiste français d’origine magrébine vivant à Montréal. Ce dernier réalise des tableaux où il se met lui-même en scène et joue différents personnages et notamment « la femme voilée ». Il sait que son art est moins bien vu en France qu’au Canada. S’il était resté en France, aurait-il pu s’épanouir en tant qu’artiste et en tant que queer? Ce n’est pas certain.
« 2FIK se sent mal dans sa peau en tant qu’artiste à Paris. Jouer la femme voilée à Paris, ça touche un nerf sensible et les Français ne sont pas encore prêts à accepter ses images », affirme Denis Provencher. Tandis qu’il se sent plus libre d’exercer son art et de s’affirmer en tant que queer au Canada et aux États-Unis, deux pays qui sont multiculturels.
Être homosexuel, n’est pas facile. On a du mal à s’accepter, à être accepté et cela affecte beaucoup. L’acceptation de la communauté queer est différente selon les pays et les cultures. La communauté LGBTQ a encore un long chemin à parcourir avant d’être acceptée par toutes les couches de la société.
Photo : de gauche à droite : Jorge Calderón, Denis Provencher et Pascal Michelucci.