De quoi la guerre a-t-elle l’air aujourd’hui? Cette question, le brigadier-général Richard Giguère se la pose souvent, lui qui a bourlingué avec son 22e régiment d’un conflit à un autre aux quatre coins du monde, de Kaboul à Kandahar en passant par Oka. Après avoir fréquenté pendant 35 ans les principaux points chauds de la planète, il commande depuis 2003 le Collège des Forces canadiennes à Toronto. Invité le mardi 21 janvier par le Club canadien à l’occasion du déjeuner d’affaires mensuel, ce soldat chevronné a livré ses impressions sur ses expériences passées ainsi que sur l’avenir qui attend nos forces armées.

Durant la Seconde Guerre mondiale ou bien même tout au long de la Guerre froide, la donne était simple et les règles clairement établies.
« Je savais même exactement où je devais me rendre si la guerre venait à se déclarer, explique-t-il. On connaît parfaitement la date du début et de la fin des conflits d’autrefois. On sait aussi qui a gagné. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas et on doit revoir la notion même de conflit ».

Les missions ont en effet beaucoup évolué depuis la guerre de Corée. L’armée canadienne a dû faire face à des défis de plus en plus complexes tels que la mission onusienne à Chypre, l’intervention à Sarajevo, le conflit afghan, les frappes aériennes en Libye, les manifestations à Oka ou encore la tempête de verglas au Québec. M. Giguère souligne que notre armée se prépare également pour affronter des attaques d’un tout autre genre comme le cyber terrorisme, la guerre bactériologique, les actes de piraterie au large des côtes africaines ou les crimes transnationaux. Dans certains cas, l’image du soldat musclé et armé jusqu’aux dents est substituée par celle d’un combattant assis devant un ordinateur.

La qualité du personnel et de ses chefs reste néanmoins primordiale. M. Giguère se plaît à citer le général Patton qui déclarait que les guerres sont menées avec des armes, mais gagnées par des hommes (aujourd’hui aussi par des femmes). Il mentionne aussi qu’il a connu des chefs de guerre afghans illettrés qui n’en étaient pas moins d’excellents leaders. La qualité du personnel militaire est d’autant plus importante que les conflits semblent devenir de plus en plus complexes. La moindre erreur commise par un simple soldat peut coûter très cher, une notion que les militaires appellent le « caporal stratégique ». Les conséquences résultent très souvent par la perte de soldats. Ceux qui en reviennent tout entiers souffrent parfois du syndrome post-traumatique.

Quand les troupes canadiennes ne sont pas en action, elles passent le plus clair de leur temps à s’entraîner. Pour être prêt, il s’agit d’analyser les tendances, de bien se préparer, de retenir les leçons et d’être en mesure de se remettre des surprises. M. Giguère rappelle que tout chef militaire n’a qu’une seule idée en tête : effectuer sa mission et ramener tout son monde vivant.

La guerre a peut-être changé, mais le danger reste toutefois présent à chaque instant. Elle apporte toujours son lot d’anxiété. M. Giguère parle en connaissance de cause puisqu’il a vécu en quelque sorte trois campagnes en Afghanistan : deux en tant qu’acteur et une en tant que père. Son fils Simon a lui aussi effectué une mission à
Kaboul.

Pour plus de renseignements au sujet des déjeuners d’affaires du Club canadien de Toronto : http://www.clubcanadien.ca. Le prochain déjeuner aura lieu le mercredi 26 février et l’invité sera Krishen Rangasamy, économiste principal, Économie et Stratégie, à la Financière Banque Nationale.