Savez-vous apprécier un bon vin? Êtes-vous capable de le reconnaître d’après sa couleur, son nez ou son goût tel que son amertume, sa texture ou bien son astringence? Quand vous choisissez votre vin, cantonnez-vous aux vins français ou bien n’hésitez-vous pas sortir des sentiers battus et à essayer autre chose? Voilà justement le genre de défi que l’Alliance française de Toronto (AFT) proposait lors d’une dégustation sur les vins de la péninsule du Niagara, le mercredi 30 janvier. Mise en place en collaboration avec Toronto Accueil, un organisme chargé d’accueillir les nouveaux arrivants, les services culturels de l’AFT avaient invité ce soir-là Christian Dubois du Bellay, œnologue d’origine française.

Avant de déposer ses valises dans la Ville reine, M. Dubois du Bellay eut l’occasion d’affiner ses connaissances en travaillant à bord de l’Orient Express ainsi que dans de grands restaurants parisiens, australiens et américains. Après avoir transporté son auditoire à travers les grands bastions vinicoles français tels que le Bordelais ou la Champagne lors des six dernières conférences d’une série intitulée Wine Connection, l’œnologue avait cette fois fait le pari de mettre en vedette des vins mûris et produits à seulement une heure de route de Toronto.

Pour l’occasion, M. Dubois du Bellay avait choisi de présenter un vin blanc et deux rouges, pour des prix avoisinant les 30 $.

Le premier fut donc un Riesling 2011, issu du vignoble Thirty Bench d’appellation VQA (Vintners Quality Alliance) Beamsville Bench. Ce vin blanc, moyennement corsé, aux saveurs de pêche, de citron et de pamplemousse sembla ravir certains dégustateurs. Le second vin présenté, un rouge cette fois, fut un Laundry Cabernet Franc 2010 Tawse d’appellation VQA Lincoln Lakeshore. Ses soupçons de poivre blanc au nez ainsi que ses sensations de cerise noire et de cassis au palais obtinrent l’approbation de ceux qui préfèrent les vins rouges plus corsés.

« Je servirais bien ce vin avec une bonne viande rouge », confie Régine Hervy, une Française installée à Toronto depuis cinq ans qui compte le vin comme une de ses passions.

Pour terminer, c’est un Black Paw Vineyard Pinot noir 2010 de Coyote’s Run d’appellation VQA Four Mile Creek que M. Dubois du Bellay proposa à ses convives. Ses effluves de cerise et de framboise recueillirent les faveurs de ceux qui, comme moi, préfèrent les vins légèrement plus légers que le précédent.

Si l’on peut être surpris par le taux d’alcool contenu dans un vin produit au Canada, 13 % pour ce qui est du Pinot noir, M. Dubois du Bellay ne manqua pas de faire remarquer que les températures peuvent atteindre les 30 °C l’été dans la péninsule du Niagara. Campés en bordure du lac Ontario et à flanc des coteaux de l’escarpement du Niagara, une longue chaîne de collines qui s’étend de Niagara à la péninsule de Bruce, les vignobles bénéficient des bienfaits d’un micro-climat.

La région est divisée en une dizaine de cépages : Riesling, Chardonnay, Gewurztraminer et Sauvignon blanc pour les vins blancs et Cabernet franc, Pinot noir, Gamay noir, Merlot et Cabernet sauvignon pour les rouges. Les vins de la Péninsule, plus grande région vinicole en surface au Canada, ont pris leur essor vers la fin des années 1980. La réputation de la région n’est plus à faire, tout particulièrement pour ses vins de glace. À ce sujet, M. Dubois du Bellay fit remarquer que le vin de glace Inniskillin remporta un prix lors du prestigieux salon international Vinexpo à Bordeaux en 1991.

Ce genre de reconnaissance pour des vins produits hors des régions traditionnelles comme la France a piqué la curiosité des connaisseurs et a amorcé un changement dans les attitudes.

« Nous consommons environ 50 % de vins français et 50 % de vins issus d’Amérique du Nord ou d’autres coins du monde », partagent Valérie et Frank Leclerc, une famille originaire de France et installée au Canada depuis une quinzaine d’années.

Un signe qui ne détrompe pas et qui justifie pleinement le choix fait par M. Dubois du Bellay de présenter un vin issu du Nouveau Monde, un vin en fait bien de chez nous.

Photo : Christian Dubois du Bellay et Régine Hervy