Sobrement intitulée Dans les mots de Camille, la lecture de la correspondance entre les célèbres sculpteurs français du XIXe siècle Camille Claudel et Auguste Rodin n’inspirait pas la joie. Véritable récit de la descente aux enfers de cette jeune passionnée de la glaise et du bronze, toutes les étapes de sa vie d’artiste étaient présentes. De ses premiers succès dans son atelier parisien à son décès au centre de santé de Montfavet à Montdevergues, l’élévation et la chute de cette femme souvent victime de persécutions imaginaires est dépeinte. Un voyage au cœur de celle qui fut injustement internée et dont le travail fut largement copié et exploité par des chercheurs d’or sans scrupules.

C’est au théâtre de l’Alliance française de Toronto (AFT) que se sont produits Louise Naubert et Bernard Meney devant une vingtaine de personnes. Assis de chaque côté de la scène, les deux lecteurs ont tour à tour retransmis au public ce qui se trouvait sur leurs feuilles. Les lumières s’ouvraient sur le personnage qui s’exprimait avant de fondre pour se focaliser sur l’autre. La lecture fut entrecoupée de projections montrant les visages des deux personnages avec quelques lignes soulignant la gravité de la situation.

Les deux membres de la troupe de théâtre La Tangente livrent leurs impressions après leur prestation du samedi 4 octobre. « Il y a eu beaucoup d’écoute même si les sons de téléphone nous ont dérangés, s’exclament-ils à l’unisson. Ça n’est pas un sujet facile. On rentre dans l’intimité de Camille Claudel et c’est triste à mourir. »

Ayant effectué eux-mêmes la sélection des textes, ils expliquent leur choix : « Il y a une passion pour la sculpture que les deux partageaient, dit Mme Naubert. C’est intéressant pour nous en tant qu’artistes de faire revivre le personnage. » Le spectacle lui-même fut élaboré par la chorégraphe montréalaise Sylvie Bouchard sur une idée de Claude Guilmain, directeur général du théâtre, qui venait de lire une biographie de Camille Claudel. 

L’absence de mouvement tout au long de la lecture est la volonté de refléter l’immobilité de la sculpture sur le thème d’une femme qui s’enfonce. « C’est une femme qui a voulu se libérer, renchérit Mme Naubert. Rodin est devenu un prétexte pour parler de son combat. »

Habitués de la scène, le duo sera de retour du 23 au 25 octobre dans L’implorante et l’éternel voyage au Théâtre du centre Harbourfront.

Photo : Louise Naubert et Bernard Meney