Vous lui dites : « Tu me traites comme si je n’existais pas. C’est ton devoir ma fille. J’ai peur que tu te fasses mal. Attends que ton père arrive! » Et elle de vous répondre du tac au tac : « Laisse-moi vivre. Les temps ont changé. C’est de l’exploitation. Tu n’es qu’une hypocrite! »

Les relations intergénérationnelles entre fille et mère sont parfois conflictuelles, quelle que soit la culture. La seule différence est qu’elles se manifestent différemment, comme purent s’en rendre compte ceux qui assistaient à une rencontre organisée par Oasis Centre des femmes à l’occasion de la Journée internationale de la jeune fille.

Pour la seconde fois qu’il marquait cet événement mondial patronné par les Nations Unies, le centre d’aide aux femmes francophones avait choisi de présenter à son auditoire deux scénarios, tous les deux représentatifs de ce qui se passe souvent entre une mère et une fille. L’un montrait une jeune « Canadienne » essayant de communiquer avec sa mère par SMS; l’autre, une jeune fille en train de dialoguer par l’intermédiaire de Skype avec sa mère rentrée momentanément en Afrique. Si les détails touchaient de près à des cultures différentes, on retrouvait cependant la même frustration quand il s’agit de s’écouter et de se comprendre. Les deux mères se préoccupaient plus du respect, du sens du devoir et de l’excès d’individualisme affiché par leurs filles. Les filles quant à elles sont plus intéressées à leur indépendance, à leur désir de découvrir la vie par elles-mêmes et à la sexualité.

La soirée s’est poursuivie par une activité qui symbolisait la libération des jeunes filles des entraves qui se présentent à elles pour atteindre leur plein potentiel, aussi bien au Canada que dans le reste du monde. Des paires de tongs, chaussures avec lesquelles les jeunes filles vont cheminer dans la vie, furent décadenassées d’une clôture en grillage. Une fois le cadenas enlevé, on pouvait également lire un passage qui décrivait le vécu de la jeune fille et ses aspirations pour l’avenir.

« Une jeune fille sur quatre est mariée avant l’âge de 18 ans. Au total, 150 millions d’entre elles le seront au cours de la prochaine décennie à travers le monde, rappelle Dada Gasirabo, directrice générale du centre. À cela s’ajoutent d’autres graves entraves comme la mutilation et l’absence de scolarisation. »

Une fois arrivée au Canada, la famille immigrante est confrontée à de grands écarts culturels entre les parents élevés au pays et les enfants qui ont grandi au Canada. À titre d’exemple, une mère africaine ne parlera pas aisément de sexualité avec sa fille, ce rôle étant souvent laissé à une tante ou bien une autre femme du village en Afrique. En Afrique, il est tout à fait naturel que l’aînée des filles s’occupe de ses frères et sœurs durant une absence prolongée de la maman. De plus, Dada Gasirabo faisait aussi remarquer que le message donné par les parents immigrants est parfois contradictoire avec celui relayé par l’école canadienne.

Les jeunes filles de familles immigrantes peuvent ainsi se tourner vers un organisme tel qu’Oasis Centre des femmes quand elles se retrouvent confrontées à ces problèmes. Par le biais de rencontres dans les écoles et l’utilisation tout récemment des médias sociaux comme Facebook, l’organisme tente de répondre aux multiples questions que se posent les jeunes filles et qu’elles n’osent pas aborder avec leur mère.

Dada Gasirabo soulignait enfin que c’est toute la société qui en profite lorsque les filles ont des chances égales à celles des garçons. Elle ajoutait que pour cheminer vers un bel avenir, il convient d’ôter les barrières, une à la fois. 

Pour plus d’information au sujet d’Oasis Centre des femmes : www.oasisfemmes.org.

Photo : Au tour de Nika Raciella (à gauche) et Fété Kimpioki