Lors d’une récente entrevue avec Le Métropolitain, Marcelle Lean, fondatrice et directrice artistique et générale du festival de films francophones de Toronto, rapporte que la cuvée 2013 de Cinéfranco fut fluide, chaleureuse et amicale. Environ 3500 entrées ont été vendues, soit une augmentation d’environ 10 % à 15 % par rapport à l’an dernier.

« Cela nous a fait un bien fou de nous sentir chez nous! Nous avons connu une véritable renaissance. J’ai parlé avec beaucoup plus de gens cette année », se réjouit Mme Lean. Elle pense que la salle du cinéma Royal et le quartier de la Petite Italie expliquent peut-être pour beaucoup cette augmentation de fréquentation. Le fait que le « Royal » soit de plain-pied permet aux bénévoles d’être plus visibles. Ils sont en mesure de pouvoir aborder les passants dans la rue durant le festival. Les attroupements de personnes qui se constituent sur le trottoir attisent la curiosité des autres. Le quartier est aussi coutumier de recevoir des événements tel qu’un festival cinématographique.

C’est après un hiatus de quatre ans que Cinéfranco faisait son retour dans la Petite Italie. La perspective de coûts de location plus élevés au cinéma Royal et des conditions avantageuses offertes pendant un temps par le cinéma AMC et le Festival international du film de Toronto (TIFF) avaient amené les organisateurs à déplacer Cinéfranco. Cette année, une très grande amélioration dans les relations avec le cinéma Royal les ont convaincus de revenir au bercail. « Malgré des installations techniques formidables au AMC et au TIFF, nous nous sentions noyés. Nous avions perdu en termes de visibilité », confie Marcelle Lean.

Si l’on cherche un fil conducteur dans la série de films présentés cette année, Marcelle Lean estime qu’il faut retenir le thème de la conscience sociale. Le féminisme (Les Femmes du bus 678), l’univers carcéral (Dead Man Talking), l’homophobie (Invisibles) et la criminalité (Paulette) furent abordés tour à tour. En termes de popularité, Le Prénom a remporté la palme avec 350 billets vendus, suivi par Un bonheur n’arrive jamais seul (255), La Vérité si je mens (220) et Paulette (215). Marcelle Lean avoue sa surprise de voir des comédies pas si récentes prendre le pas sur des films moins connus pour lesquels les artistes étaient présents dans la salle.

En mal de cinéma populaire français, c’est en 1998 que Marcelle Lean lança le projet d’un festival de films. Selon elle, les films français qui étaient alors présentés dans la Ville reine relevaient plus du « cinéma d’auteur » et donc d’une conception élitiste du cinéma. Des amis parvinrent à la convaincre de surmonter les craintes qu’elle ressentait sur le plan financier et de faire partager aux Torontois son amour pour le cinéma populaire français. Cinéfranco fut logé au cinéma Cumberland à ses débuts, endroit naturel puisque celui-ci présentait déjà des films français et étrangers.

Mme Lean tient à souligner que l’existence de Cinéfranco repose entièrement sur le formidable travail et l’intelligence de ses bénévoles. Chaque année en juillet, Marcelle Lean se rend à Paris pour visionner des films qui sortiront à l’automne en France. Elle va au cinéma du matin au soir afin de trouver des perles qu’on ne voit pas en Amérique du Nord. Elle profite par ailleurs que sa sœur réside à Montréal pour faire de la prospection au Québec. Une autre bénévole, Yvette Sherman, assiste quant à elle au Festival international du film francophone de Namur, le plus gros festival du genre, qui se déroule tous les ans au mois d’octobre en Belgique.

Quand on lui demande de rêver un instant « en technicolor », Marcelle Lean souhaiterait qu’on trouve un mécène pour Cinéfranco afin d’assurer sa stabilité financière une fois pour toute. Pour l’instant, le festival compte seulement sur la Fondation Trillium et Patrimoine canadien pour garantir sa survie l’an prochain. Elle aimerait aussi lui trouver un foyer permanent et reste à l’écoute de toute proposition qui pourrait lui être faite. Mme Lean juge que la réalisation d’un tel rêve serait la légitimation du fait que nous sommes après tout un pays bilingue et biculturel.

Marcelle Lean avoue enfin que le fait de voir enfin les films qu’elle a programmés être projetés à Toronto lui procure un plaisir fou. Comme elle, bon nombre de Torontois attendent de partager ce même sentiment en avril 2014.

Pour toute information au sujet de Cinéfranco, visitez le site www.cinefranco.com.

Photo : Soirée d’affluence à Cinéfranco