Richard Caumartin
Une des forces de Francophonie en fête est la capacité de l’organisme de recruter du sang nouveau chaque année au sein du comité organisationnel et du conseil d’administration pour amener de nouvelles idées et surprendre le public à la rentrée d’automne avec une programmation diversifiée et de belles surprises.
2005
Mais ça n’a pas été de tout repos au début en 2005. Il faut se souvenir que le premier essai de ce festival intitulé « Festiv-été » avait été organisé par Steve et Michael Murphy durant la saison estivale, du 5 au 7 août à la Place Ontario. Les organisateurs voyaient beaucoup trop grand pour une première tentative qui n’a pas connu le succès escompté et qui a conduit à un déficit important. D’ailleurs, le festival musical n’a pas eu lieu en 2006.
En 2007, l’organisme se dote d’une direction générale avec l’embauche de Jacques Charrette qui ne tarde pas à mettre en place un comité organisateur pour présenter une journée de prestations musicales. La vraie aventure de Francophonie en Fête commence cette année-là. En voici les grandes lignes.
2010
Après trois années de partenariat avec le Salon du livre de Toronto, Francophonie en Fête voulait maintenant voler de ses propres ailes et se définir en tant qu’organisme qui fait la promotion de la richesse et de la diversité culturelle franco-ontarienne à un jeune auditoire francophone et francophile. Le succès des spectacles de 2009 était dû, en grande partie, à la qualité de la programmation avec des artistes tels que Michel Rivard, Pêro et Andrea Lindsay.
En 2010, le concert de Daniel Lavoie au Studio Glenn Gould a marqué l’apogée du festival. Seul au piano, l’homme aux multiples Victoires de la musique a offert, devant une salle comble, un concert intimiste et intense.
Cependant, Francophonie en Fête a toujours eu comme obstacle à son développement une mission qui n’était pas claire aux yeux de la communauté qui a toujours vu cette association comme un concurrent de la Franco-Fête. Selon le directeur général de Francophonie en Fête, Jacques Charette, cette perception est fausse. « Nous voulons simplement offrir aux francophones et francophiles une autre occasion au cours de l’année de célébrer notre langue en faisant connaître les artistes émergents franco-ontariens en plus de présenter une vitrine représentative du Grand Toronto multiculturel francophone », insiste-t-il.
Pour réussir à s’ancrer sur des bases solides, l’organisme a reçu une subvention de la Fondation Trillium de l’Ontario pour travailler sur sa planification stratégique.
2011
Diane Tell a présenté son tour de chant au studio Glenn Gould en ouverture du festival Francophonie en Fête. L’artiste québécoise a fait voyager son public, tantôt du côté de Val-d’Or, en Abitibi, où elle a grandi, entre la mine et la forêt, à Québec, où elle est née, ainsi qu’à Biarritz, au Pays basque, où elle vit depuis 1988. Elle a interprété ses plus grands succès tels que La Légende de Jimmy, en hommage à James Dean, et La Falaise, berçant presque littéralement un public aux anges.
2012
Pierre Lapointe et Vincent Vallières étaient les têtes d’affiche de Francophonie en Fête. Le slogan de cette 7e édition était « la récolte des fruits de la francophonie ». Au programme : des chanteurs aux textes fins et poétiques, de la musique folk québécoise, du cabaret, du blues de Madagascar, de la musique africaine, caribéenne et même française.
Les artistes Jocelyn Bérubé, Mastik, Madagascar Slim, Suzana d’Amour, ou encore Lyne Tremblay, qui a formé un duo insolite avec Julie Crochetière, étaient aussi de la fête.
Le 23 septembre, le festival a célébré le Jour des Franco-Ontariens avec Les Giselles, un groupe de Sudbury ayant beaucoup d’énergie, de bonne humeur et, surtout, de français!
2013
Damien Robitaille était de retour à Toronto. L’artiste originaire de Lafontaine a interprété avec son enthousiasme contagieux des chansons tirées de son dernier album Omniprésent, un opus coloré de cadences latines, sur la scène du Randolph Theatre. « Pour moi, c’est toujours le fun de retourner à Toronto. C’est un peu chez moi. J’ai de la famille à Kitchener-Waterloo. Il y a beaucoup de visages familiers dans le public », avait confié l’artiste au journal Le Métropolitain lors de son passage dans la Ville reine.
Pour sa seconde soirée de spectacle, Francophonie en fête avait misé sur la musique néo-traditionnelle canadienne-française avec le groupe franco-ontarien Swing en première partie, suivi par le célèbre ensemble québécois Mes Aïeux. Les amateurs de folk urbain et de musique aux rythmes endiablés ont été comblés!
2014
Francophonie en fête 2014 a récolté dans sa corbeille une belle sélection des meilleurs fruits de la musique francophone en Ontario et au Canada. Le groupe ontarien En Bref a ouvert les festivités musicales avec des morceaux tirés de deux de ses albums. Puis le chanteur et poète Yao a entamé la deuxième soirée au théâtre Randolph. La volupté de sa voix et la richesse de ses textes ont charmé le public. Le groupe originaire des Maritimes, Radio Radio, qui électrise son public par son énergie et sa poésie empreinte d’acadien et de chiac, faisait aussi partie de cette programmation. Le public torontois a été gratifié de la très jolie voix d’Amélie Lefebvre, accompagnée comme à l’accoutumée de ses singes bleus. Mais c’est le groupe très populaire du Québec, Les Cowboys Fringants, qui a fait craquer les spectateurs au Randolph Theatre.
2016
« Des sons à profusion », tel était le thème de la 11e édition de Francophonie en Fête.
Annoncé avant l’été et figurant parmi l’un des concerts les plus attendus, Michel Rivard a tenu la tête d’affiche du festival. L’artiste québécois Stefie Shock était aussi de la programmation et a interprété des chansons de Serge Gainsbourg pour un moment d’émotion et de poésie. Parmi les noms figurants sur la liste des concerts gratuits, il y avait des Franco-Ontariens bien connus de la communauté tels que Melanie Brulée, le groupe Welcome Soleil, et la formation Hampaté Sahel Blues qui transporte le spectateur aux origines du blues de l’Afrique de l’Ouest et l’artiste malgache Donné Roberts et ses musiques du monde.
2017
Avec plus de 2400 spectateurs aux évènements payants et 7400 visiteurs à ceux gratuits, « Francophonie en Fête est en pleine croissance », assurait le directeur du festival, Jacques Charette. D’ailleurs, au cours des deux années précédentes, Francophonie en fête s’est diversifiée. En plus du festival en septembre, d’autres activités ont eu lieu : la venue des humoristes Sugar Sammy et Louis-José Houde. Pour sa 12e édition, le comité organisateur a présenté les concerts de deux icônes de la chanson québécoise au théâtre Randolph, Jean-Pierre Ferland et Robert Charlebois. De plus, 16 prestations musicales ont été offertes gratuitement sur la scène OLG dans le quartier de La Distillerie dont celle de Kyris, l’un des fondateurs de Franc’Open Mic. Pour la Journée des Franco-Ontariens, le 25 septembre, Gabrielle Goulet a chanté pour les jeunes de 11 à 17 ans.
2021
En 2021, la 16e édition de Francophonie en Fête s’est tenue à la Mezzanine Timber, sur la promenade The Bentway. Une terrasse aménagée pour servir bières et cidres était également proposée aux festivaliers. Une première en direct, après 18 mois de pandémie de COVID. Les concerts se sont déroulés en toute sécurité en application des mesures sanitaires et de distanciation en vigueur à Toronto. Pendant ces quatre jours, 26 spectacles diversifiés étaient proposés gratuitement. Les rythmes de la Francophonie des artistes issus de la mosaïque multiculturelle franco-ontarienne, dont certains originaires d’Afrique et des Antilles.
2022
Le festival revenait en force dans le visage culturel de Toronto avec une brochette étonnante d’artistes pour sa 17e édition extravagante, dynamique et représentative de l’effervescence artistique et multiculturelle francophone de la région et d’ailleurs en Ontario.
Dans le cadre des activités de la Semaine de la Francophonie à Toronto, Francophonie en Fête proposait deux prestations musicales au Daniels Spectrum mettant en vedette, en première partie, l’autrice, compositrice et interprète métisse Mimi O’Bonsawin, et pour le spectacle principal, la très talentueuse artiste de renommée internationale Diane Tell.
Puis, en septembre, il y a eu deux spectacles en salle, soit celui pour célébrer le 30e anniversaire de l’album Sauver mon âme de Luc De Larochelière au Glenn Gould Studio avec, en première partie, la prestation de la chanteuse Andrea Lindsay. Puis, Louis-Jean Cormier a présenté son spectacle au Paradise Theatre. Une trentaine de prestations musicales ont été offertes à l’amphithéâtre The Bentway.
2023
Malgré des contraintes budgétaires, Francophonie en Fête proposait encore trois concerts : ceux de La Compagnie Créole à l’école secondaire Saint-Frère-André, de Fred Pellerin et Daniel Bélanger au Paradise Theatre.
Les efforts de l’équipe sont très appréciés du public torontois. Marie Claude, une enthousiaste de Francophonie en Fête qui ne manque aucune édition, invite tout le monde à la rejoindre chaque fois pour un week-end de plaisirs et de découvertes. « Je dis à mes amis que je suis là et ils me rejoignent pour une partie de la journée, confiait-elle au cours de l’édition 2023.
Elle aime que les concerts « fassent voyager dans les époques des années 1980 à nos jours, et à travers le monde ». Elle aime aussi l’accessibilité des vedettes. « On en voit passer d’un groupe à l’autre, on peut leur parler. » Elle garde le souvenir de sa rencontre avec Robert Charlebois il y a quelques années. « Au Québec, ça aurait été impossible, il aurait fallu attendre des heures. »
Quant au lieu, « ici les gens viennent vraiment pour l’événement », contrairement à La Distillerie dans le passé, où il y avait « plus de passage d’anglophones, mais qui n’étaient pas intéressés », conclut-elle.
2024
Pour une première fois, une bourgade de francophones occupait tout l’espace du Bentway, pour la 19e édition de Francophonie en Fête. Le festival plein air y présentait sa programmation dans un nouveau décor franco. En entrant sur le site, des kiosques de produits et des fournisseurs de services en français étaient installés des deux côtés du Bentway, entourant des tables de pique-nique menant à la grande scène.
Un nouveau concept de petit village francophone qui a créé une ambiance plus chaleureuse et festive. La première soirée a attiré beaucoup de francophones avec des DJ populaires et le spectacle attendu de Kizaba, pionnier de la musique électro afro-congolaise. Le public a aimé la nouvelle formule qui servait de prélude et de test pour la 20e édition prévue en septembre 2025.
2025
Depuis 20 ans, Francophonie en Fête a permis à de nombreux artisans de la scène musicale d’exprimer leur art dans toute sa diversité, au public de faire de belles découvertes et de revoir des artistes plus connus des francophones de Toronto qui ont quitté la région depuis quelques années. C’est le cas de Bernard Dionne, ancien membre du groupe Welcome Soleil à Toronto qui vit, depuis 2019, à Québec. Il n’en était pas à sa première participation cette année pour la 20e édition. « J’ai pris part à plusieurs reprises au Festival avec Welcome Soleil, se souvient l’artiste. J’ai toujours été très fier de la francophonie torontoise et de participer aux activités. Nous sommes peu nombreux dans la masse, mais nous sommes dynamiques. Il y a plusieurs artistes qui ont émergé de Francophonie en Fête, la relève, des rappeurs et des jeunes qui ont eu l’opportunité de débuter leur métier ici. Bravo à toute l’équipe qui participe activement au développement artistique et culturel de la francophonie torontoise! »
La dernière édition a une fois de plus démontré la quête de l’organisme pour introduire au public francophone de la Ville reine de nouveaux talents tels que Jessy Lindsay d’Ottawa, une francophone qui compose ses chansons et ses musiques avec une touche personnelle qui inspire la jeunesse franco-ontarienne. Mais aussi sa capacité à attirer les grands noms de la scène francophone internationale comme ce fut encore le cas en septembre dernier avec les prestations extraordinaires de Claude Dubois et de l’humoriste Anthony Kavanagh. La recette a levé depuis 20 ans. Longue vie à Francophonie en Fête.
Photo : Des membres du conseil d’administration et du comité organisateur de Francophonie en Fête 2025. De gauche à droite : Caroline T. Paterson (secrétaire), Med Tomed (administrateur), Jacques Charette (directeur général), Geneviève Girard (vice-présidente et trésorière), Lawrence St-Onge (président), Elsa Planque (communication et marketing) et Thierno Soumaré (logistique, programmation et MC)