Richard Caumartin

Le Réseau en immigration francophone du Centre-Sud-Ouest (RIFCSO), par le biais des Comités locaux en immigration francophone (CLIF) de Toronto et de Peel, a invité, le 1er novembre, la communauté à la présentation publique du rapport Analyse des besoins des immigrants francophones dans la région de Toronto et de Peel à l’auditorium du Collège Boréal.

Cette étude, réalisée en partenariat avec le cabinet Brynaert, Brennan et Associés au cours des deux dernières années est la première étude de besoins menée par le RIFCSO couvrant deux régions où réside la population francophone la plus importante du Centre-Sud-Ouest ontarien.

L’objectif principal de cette rencontre était de sensibiliser le public aux besoins actuels des immigrants francophones et d’engager des discussions sur des moyens d’améliorer les services pour mieux répondre aux besoins émergents.

Il s’agissait également d’une opportunité de rencontres et d’échanges avec les acteurs clés de l’immigration francophone de ces deux régions pour mieux cerner les enjeux et défis auxquels font face les immigrants francophones.

La présentation réunissait des représentants des organismes communautaires tels que le Collège Boréal, les conseils scolaires MonAvenir et Viamonde, FrancoQueer, La Maison de Toronto, Oasis Centre des femmes et des représentants du Bureau des nouveaux arrivants de la Ville de Toronto.

« Les immigrants francophones font face aux mêmes difficultés que les immigrants en général dans les régions de Toronto et de Peel, voire aux difficultés auxquelles sont confrontés tous les résidents de la région métropolitaine. On parle ici de l’accès au logement abordable, l’accès à l’emploi et la sécurité d’un revenu suffisant, et la clé est la maîtrise de l’anglais, langue de travail », précise le rapport.

Les personnes immigrantes interrogées dans le cadre de cette recherche n’expriment pas leurs besoins en fonction du modèle connu des services d’établissement.

« Les enjeux de santé mentale sont de plus en plus présents dans le discours public et dans les considérations de politiques publiques. L’expression du ressenti des personnes immigrantes est frappante dans les groupes de discussion. Par conséquent, le stress et la détresse sont liés aux difficultés de vie quotidienne (logement, nutrition, garde des enfants, accès aux services de santé, vie familiale et de couple), décrit le document présenté par le RIFCSO.

« Il y a aussi les espoirs trahis d’une fausse promesse d’un pays bilingue, où l’on peut vivre et travailler en français partout au Canada. Puis, le sens de dévalorisation de la personne provoqué par un ensemble de facteurs professionnels (statut d’emploi, reconnaissance des compétences et diplômes, etc.). Et enfin, la perte de repères socioculturels et le coût psychique de la reconstruction identitaire fondée sur des identités multiples, en particulier pour les groupes marginalisés (communautés racialisées, LGBTQ+, femmes).

« Ces ressentis ne sont pas une expression de nouveaux besoins. Ils sont cependant une base importante du design des services d’établissement en français. »

Autres sujets traités dans cette étude : la proximité géographique des services offerts en français pour les familles immigrantes, l’accessibilité à un logement salubre et abordable, les soins de santé, la justice et les services de garde d’enfants.

Les répondants à cette enquête ont aussi mentionné l’importance de la stabilité et de la qualité des services offerts en français ainsi que la continuité opérationnelle, car les défis de rétention du personnel entraînent une conséquence directe sur la continuité et le maintien de la qualité des services.

Pour le consultant Matthieu Brennan, « il faut développer le lien avec la clientèle immigrante au-delà du transactionnel. Cela demande un investissement plus important et doit être mentionné dans les dossiers par les établissements auprès d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) ». Parmi les chiffres mentionnés, 80 % des services d’établissements sont consommés dans les 16 premiers mois par les nouveaux arrivants et 20 % sont étalés dans les deux années qui suivent.

Afin de viser une égalité réelle dans les services aux personnes immigrantes francophones, plusieurs recommandations émergent de cette étude. Tout d’abord, formaliser les services d’accompagnement pour les besoins de base.

« L’aiguillage vers de nombreux services de la communauté pouvant aider à répondre aux besoins de logement, santé et sécurité dirige les personnes immigrantes francophones vers des tierces parties anglophones à Toronto et Peel.

« IRCC, de concert avec les parties prenantes gouvernementales et communautaires, devrait appuyer le développement de services spécialisés dans les communautés francophones en situation minoritaire ou l’adaptation en français de ces services destinés principalement à une population immigrante francophone, indiquent les conclusions du rapport.

« Le tissu social de la communauté d’accueil francophone dans les régions de Toronto et de Peel est plus étiré que ne l’est celui de la communauté d’accueil anglo dominante. Les fournisseurs de services d’établissement en français doivent donc consentir un investissement relationnel plus important auprès de leur clientèle. Un groupe de travail des fournisseurs de service devrait mener une réflexion sur le design des modalités de services holistiques afin de mieux répondre aux enjeux psychologiques et socio-émotionnels sous-jacents la livraison transactionnelle de services. »

Photo (RIFCSO) : Les participants à la rencontre étaient surtout des fournisseurs de services francophones.