Jean-François Gérard

“Ce soir, ça va zouker ! “ affiche le panneau lumineux de l’école Saint-Frère André mardi 28 mars. La Compagnie Créole a été fondée en 1975, mais il aura fallu attendre 2023 pour qu’elle se produise pour la première fois à Toronto, en clôture de Francophonie en Fête. La troupe est pourtant habituée des tournées au Québec, la chanteuse Clémence Bringtown répète d’ailleurs à plusieurs reprises qu’elle est heureuse d’être chez “nos amis Québécois”.

Qu’importe pour la géographie, le public multi-générationnel est là pour danser et faire la fête. Dès les premiers titres, les allées et les côtés de la scène sont investis par quelques danseurs. S’ensuit un moment émotion lorsque Clémence Bringtown parle de “José” : “Il n’a pas sa guitare, il marche moins bien”, depuis qu’il est atteint de la maladie de Parkinson et “ne voulait plus remonter sur scène”. Mais le voici désormais de retour avec la bande. Qui enchaîne avec un chant poétique en forme de prière pour les marins face aux tempêtes.

L’ambiance monte d’un cran avec Vive le Douanier Rousseau ! Tout le devant de la scène est investi, d’enfants, de trentenaires, de parents ou de grands-parents… Pendant près de deux heures, le groupe antillais entonne ses plus grands succès C’est bon pour le moral, Ça fait rire les oiseaux ou Le Bal masqué. Pour ce titre, les artistes sont répartis dans les coulisses, afin de vêtir des costumes colorés et renforcer l’atmosphère festive. L’auditorium de 490 places est complet, une dizaine de spectateurs dansent depuis l’étage supérieur. En fin de spectacle, les enfants sont invités à monter sur scène pour se déhancher. Les artistes mettent du temps à quitter la salle et échangent des poignées de mains avec leurs adorateurs.

Au bord de l’estrade, Évelyne, une Française de Mississauga qui vit depuis 56 ans au Canada capte le regard de Clémence Bringtown. Elle se fait dédicacer un disque 45 tours “On les avait vu en France à l’époque”, se rappelle cette dame originaire de Lille. “On l’a cherché au fond d’une caisse, il y avait un peu de poussière”, s’amuse sa fille Melissa. “On les écoute à la maison avec mes petits-enfants, on va les ré-écouter ces prochains jours, c’est sûr ! Il faut qu’on les revoie”, reprend Evelyne.

Le démontage des installations débutent et trois dames attendent que les artistes reviennent pour une photo. “Les enfants les écoutent à l’école. Ce sont des chansons qu’on peut toujours diffuser, il n’y a pas de paroles déplacées”, explique Nadine, enseignante. “Même ma mère de 80 ans a dansé !”, s’enthousiasme cette franco-ontarienne. “Ils ont mis le paquet, ça représente bien les Antilles”, abonde son amie Emmy. Seule petite déception que le concert se déroule “dans un auditorium et pas une salle avec plus de place pour danser”. Ce sera peut-être pour une prochaine fois. “J’aimerais qucils reviennent”, ajoute-t-elle. “C’était une première et sûrement pas une dernière”, lance le musicien Guy Bevert aux derniers spectateurs présents, tout en rejoignant les loges.

Photo : La Compagnie Créole a séduit les francophones d’ici