L’Alliance des femmes de la francophonie canadienne, en partenariat avec le Centre de la francophonie des Amériques, a présenté une table ronde sur la place des femmes francophones dans la société.

Les panélistes ont discuté des enjeux des discriminations basées sur le genre et la francophonie, en plus de partager leurs expériences personnelles ou professionnelles en lien avec celles-ci. La discussion s’est aussi tournée vers la solidarité et la place des hommes et des alliés dans la cause.

L’animatrice Nelly Dennene-Herma accueillait Léa Clermont-Dion, Lily Crist, Sébastien Lord-Émard, Amanda Simard et Luisa Veronis.

Députée à l’Assemblée législative de l’Ontario, Amanda Simard a mentionné que la politique est un des seuls domaines qui tolère encore le sexiste. « Il n’y a pas de conséquences à ces actes. Je ne veux absolument pas dissuader les femmes de se présenter, mais plutôt les préparer à cette réalité. C’est un avantage de le savoir », affirme-t-elle.

À l’Assemblée législative, Mme Simard représente une triple minorité en tant que femme, jeune et francophone. Elle dit aussi choisir ses batailles. « Je dénonce, mais je ne veux pas non plus donner de l’oxygène à cette toxicité », déclare-t-elle. En fait, elle continue son travail pour que d’autres puissent marcher dans ses pas. « Plus je prends de la place, plus ça va devenir la norme, et les agresseurs vont se fatiguer », explique-t-elle.

Autrice, docteure en science politique et militante féministe, Léa Clermont-Dion s’intéresse au discours antiféministe en ligne depuis ses 14 ans. « Je prends la parole publiquement sur ces enjeux, déclare-t-elle. Les agressions en ligne que je reçois visent justement à faire taire les femmes. »

Depuis les années 1980, elle remarque qu’un discours courant antiféministe est la haine profonde envers les hommes ou la création d’un monde qui favorise la femme.

« Une idée absolument non fondée suggérée par de nombreuses statistiques est celle voulant que les hommes soient des alliés indispensables », dénonce-t-elle. Face aux agressions, elle se rappelle qu’elles représentent une idée. « Ce n’est pas nécessairement nous qui sommes attaquées, mais bien ce que nous représentons. Ça peut aider à gérer », précise-t-elle.

Pour sa part, Sébastien Lord-Émard, militant acadien et auteur queer, maintient qu’il faudrait s’aligner plus étroitement avec les autres mouvements émancipateurs, tels celui des communautés racisées ou encore celui de la communauté LGBTQ+.

« C’est comme si chaque francophone en situation minoritaire est formé pour être militant de la langue, car on a un sens aigu de l’équité », observe-t-il.

Important aussi d’exprimer son admiration pour les femmes en position d’autorité. « Mon père a toujours exprimé son admiration pour sa superviseure. En faisant ça, il aidait à gérer la misogynie qui s’infiltre un peu partout entre les hommes et la féminité », explique-t-il.

Selon lui, la montée de tension ressentie présentement serait peut-être à cause d’un grand avancement sociétal qui se prépare.

À l’Université d’Ottawa, c’est la lutte constante contre l’anglonormativité, par exemple dans le domaine de la science. « Les inscriptions en français sont à la baisse; les étudiants de langue française ne représentent plus que 30 % », partage Luisa Veronis, géographe sociale et professeure à l’Université d’Ottawa. Il faudrait réaffirmer la langue française comme langue stratégique de défense.

« Nous sommes toujours dans une situation de vulnérabilité à cause de notre situation minoritaire », affirme-t-elle.

Lily Crist, membre du bureau de direction de la FCFA et trésorière de l’AFFC, raconte quelques anecdotes de ses discussions avec la relève. « Les jeunes femmes ont internalisé les agressions. Une main sur les fesses dans le bus le matin, c’est la norme », dévoile-t-elle, horrifiée.

En ligne, ce n’est pas mieux. « Dans les années 1980-90, il y avait des cours de sécurité physique pour les femmes, maintenant il nous faut des cours de protection contre la cyberintimidation. L’intersectionnalité doit être au cœur de tous nos projets », précise-t-elle.

Cette table ronde n’est qu’une partie d’une discussion qui se poursuivra l’automne prochain dans un Forum complet sur la question. À suivre!