Le 24 mars dernier, la Tournée des Rendez-vous de la Francophonie faisait escale à Aurora et, pendant deux heures, la salle du théâtre communautaire de la ville a vibré au son de ce langage universel : le rire. Avec cinq humoristes sur scène, le contraire eut été surprenant et ce succès d’appréciation et aussi de foule, puisque le spectacle a fait salle comble, est redevable à une collaboration entre divers organismes.

C’est la Fondation canadienne pour le dialogue des cultures qui, entre autres activités francophones qui se sont tenues au mois de mars, a été la cheville ouvrière derrière cette tournée d’humoristes dans de nombreuses communautés de partout au pays. La Fondation a pu compter sur l’appui d’organismes locaux qui, dans le cas de ce spectacle à Aurora, étaient l’Association des francophones de la région de York (AFRY), La Clé d’la Baie et le Conseil scolaire catholique MonAvenir.

Un autre partenaire majeur réside dans l’ACFO de Stormont, Dundas et Glengarry. Pourquoi? Parce que c’est à son initiative qu’est né le Concours LOL – Mort de rire, qui donne l’occasion aux jeunes de 14 à 18 ans de recevoir d’humoristes professionnels une formation qui leur permet de se produire efficacement en spectacle. Ce projet et la Tournée des Rendez-vous de la Francophonie se complétant bien, une collaboration s’imposait, d’autant plus que lancé il y a quatre ans, le Concours LOL – Mort de rire s’est rapidement étendu à l’ensemble de la province et suscite partout un grand intérêt.

C’est ainsi que parmi les cinq humoristes s’en trouvaient deux qui participent présentement à cette compétition : Brooke Jenicek, 17 ans, et Stéphane Arcand, 18 ans, tous deux de l’École secondaire catholique Renaissance, à Aurora. Ces jeunes ont offert une prestation axée sur l’autodérision, Brooke sur les relations de couple et ses premières expériences en la matière et Stéphane sur son homosexualité et son point de vue personnel sur divers sujets.

Qu’est-ce qui peut bien inciter des étudiants du secondaire à se risquer sur scène devant un public? « Mon frère faisait le concours. Ça avait l’air amusant, donc je me suis dit que je devrais faire la même chose », relate Brooke Jenicek. « J’y suis allé en aveugle, confie plutôt Stéphane Arcand. Je ne savais pas ce qui m’attendait. » Le jeune homme avait cependant une expérience en théâtre, tant scolaire que communautaire, de sorte que les arts de la scène ne lui étaient pas inconnus. Quant à sa camarade, elle a pu apprivoiser le trac et acquérir l’envie de faire rire les autres dans le cadre déjanté des matchs d’improvisation.

Les trois humoristes professionnels n’en étaient certes pas à l’étape de la formation et cela était évident tant sur scène que dans les gradins, où l’assistance a ri sans temps mort du début à la fin. C’est d’abord Didier Lambert qui, en plus d’être l’animateur de la soirée, a présenté son numéro. Son sketch, plutôt décousu mais très drôle, était fidèle à la réputation de son auteur. Versant en toute ingénuité dans la vulgarité, l’humoriste s’est néanmoins avéré un peu moins sulfureux que ce à quoi l’on aurait pu s’attendre.

La ligne est mince entre surprendre et choquer et Didier Lambert marche sur cette étroite limite en se souciant assez peu de trébucher d’un côté ou de l’autre. Son approche est simple : « C’est de dire des affaires qui ne peuvent pas se dire, mais j’essaie d’être plus soft », explique l’humoriste en entrevue. En campant sur scène un personnage gouailleur et déglingué, les énormités passent mieux auprès du public; mais même si ce ne serait pas le cas, ce n’est pas Didier Lambert qui s’en préoccuperait : « Si t’es choqué, je suis déjà rendu ailleurs ».

Autre humoriste, autre style. Le sketch de Jérémie Larouche a, comme les autres humoristes de la soirée, puisé abondamment dans la thématique du couple et de la vie de famille. Plus que l’humour, c’est aussi la bonne humeur que l’humoriste incarnait sur scène, voyant plutôt les aspects positifs dans ses anecdotes. Ce fut aussi le seul à utiliser des objets pour illustrer avec imagination un récit loufoque.

« D’imager avec des accessoires, ça rend ça rafraîchissant », explique Jérémie Larouche. L’humoriste ajoute que, de manière générale, le caractère bon enfant de ses numéros fait en sorte que chacun peut s’y retrouver car ils évoquent souvent des souvenirs de jeunesse communs à la plupart des gens. Mettre en scène des histoires surréalistes ou sortir des objets de leur contexte pour leur donner une nouvelle vie, cela élargit l’horizon créatif de Jérémie Larouche et rend inoffensifs les sujets autrement sensibles : « Ça me permet d’être éclaté mais tout le monde peut comprendre et me suivre ».

Pour clôturer la soirée, c’est à Philippe Bond que les organisateurs de cette tournée ont fait appel. Conteur invétéré, l’humoriste, dont le succès remporté au Québec s’est poursuivi à Aurora, a blagué sur des anecdotes survenues au cours de ses spectacles et a longuement improvisé avec le public. Son thème de prédilection résidait néanmoins dans sa relation avec ses parents, en particulier son père.

« Je puise beaucoup dans mon quotidien pour écrire mes numéros », confie Philippe Bond. Si plusieurs anecdotes sont en elles-mêmes comiques, il demeure néanmoins possible d’aborder les sujets difficiles sous l’angle de l’humour. Y a-t-il des thèmes qu’il choisirait de ne pas raconter en spectacle? « Pas grand-chose. Il y en a qui ont passé avant nous et qui ont ouvert le chemin. »

Ce spectacle était le dernier de la Tournée des Rendez-vous de la Francophonie. Quant au Concours LOL – Mort de rire, la finale aura lieu le 25 mai à Ottawa.

 

PHOTO: De gauche à droite : Didier Lambert, Stéphane Arcand, Philippe Bond, Brooke Jenicek et Jérémie Larouche