César d’honneur en 2001, palme d’honneur au Festival de Cannes en 2005 et Oscar d’honneur en 2017, Agnès Varda a incontestablement marqué le cinéma moderne de son empreinte.

Par le biais de la rétrospective Radicale Empathie, la cinémathèque du TIFF, à Toronto, rend hommage à cette grande dame de 89 ans en diffusant, du 22 mars au 17 avril, une trentaine de ses œuvres.

Considérée comme une pionnière de la Nouvelle Vague, aux côtés des Truffaut, Chabrol et Godard, la cinéaste française a contribué à l’émergence, dans les années 1950, d’un cinéma alternatif échappant aux standards du tournage et du montage alors érigés en dogmes.

Avec des techniques et des technologies nouvelles, elle a mis en scène des héros ordinaires et réalistes en prise avec une époque socialement tourmentée. Guidée par la volonté de changer le cinéma comme la société elle-même était en train de changer, la cinéaste a rompu avec un certain académisme, à la fois dans le jeu des acteurs, la linéarité de l’histoire, et la façon-même de filmer, avec des effets de style et de narration, se servant de la voix off et se positionnant parfois elle-même dans le champ de la caméra.

La pointe Courte (1955, Janus Film)

Mettant en scène Philippe Noiret dans La Pointe Courte (1955), son premier long-métrage sur le délitement et la renaissance d’un couple dans le sud de la France, elle connaît son premier grand succès avec Cléo de 5 à 7 (1962) qui scelle son destin de cinéaste, sans pour autant l’éloigner de sa passion pour la photographie.

Suivront plusieurs longs métrages du Bonheur (1965) aux Cent et une nuits de Simon Cinéma (1995) et sa pléiade d’acteurs : Jean-Paul Belmondo, Michel Piccoli, Alain Delon, Catherine Deneuve, Robert De Niro, Jeanne Moreau, Gérard Depardieu, Harrison Ford… En passant par Sans toit ni loi (1985), Lion d’or à la Mostra de Venise, mettant en scène Sandrine Bonnaire en vagabonde emportée par le froid.

Sans toit ni loi (1985, Janus Film)

Pas de quoi occulter l’œuvre documentaire prolifique qui emmènera la réalisatrice de par le monde, critiquant la guerre dans Loin du Viêt-Nam (1967), saisissant l’activisme noir en Californie dans Black Panthers (1969), captant le quotidien parisien dans Daguerréotypes (1975) ou celui des glaneurs grappillant les arbres et fouillant les champs après les récoltes dans Les Glaneurs et la glaneuse (2000).

À 89 ans, elle poursuit ce travail documentaire avec cette énergie et ce regard humaniste sur les gens et leur rapport à l’environnement, à l’image de son dernier film. Visages, Villages (2017) est le fruit d’un voyage à travers la France rurale à bord d’un camion photomaton qui, au fil des rencontres, se couvre des clichés d’anonymes que la réalisatrice aborde.

Cléo de 5 à 7(1962, Janus Film)

Photo (couverture) : Agnès Varda, Les Glaneurs et la glaneuse (1962)