Des enseignants affirment que le passage à la classe virtuelle a ouvert la voie à une multitude de solutions technologiques pour contourner ou contrevenir aux règles. Par exemple, certains envoient en cachette des textos à des amis ou téléchargent des applications pouvant leur donner des réponses à des questions d’examen.

Olivia Meleta, enseignante de mathématiques au secondaire à Thornhill, en Ontario, dit avoir réalisé que quelque chose clochait lorsque plusieurs élèves ont soumis des réponses à un examen en utilisant une méthode qu’on ne leur avait pas montrée.

« C’était une façon très compliquée de faire les choses, dit-elle. Leur solution nécessitait environ 20 étapes. Le processus enseigné en classe en comptait cinq ou six. »

C’est un de ses collègues qui lui a expliqué ce qui s’était sans doute déroulé. Des élèves avaient apparemment téléchargé une application appelée Photomath, censée être un outil pédagogique.

L’application – une parmi tant d’autres – numérise une photo d’un problème mathématique et propose un guide étape par étape sur la façon de le résoudre. Mise au point en Croatie en 2014, Photomath se vante d’avoir été téléchargée plus de 150 millions de téléchargements dans le monde, dont un million par des professeurs.

L’entreprise a créé un guide des « meilleures pratiques » en collaboration avec des enseignants pour montrer comment l’application peut être intégrée dans la salle de classe, soutient une porte-parole de l’entreprise.

« Le guide se concentre sur trois principes de base : renforcer les concepts appris en classe, fournir un moyen de vérifier les devoirs et accélérer l’apprentissage individuel », dit Jennifer Lui.

Mathway, une application similaire, se vante également d’avoir « des millions d’utilisateurs et des milliards de problèmes résolus ». Son objectif est de « rendre accessible à tous les élèves une assistance mathématique de qualité ».

Et même si des experts disent que ces logiciels peuvent devenir des outils pédagogiques légitimes pour les élèves, les enseignants doivent en attendant trouver des moyens de protéger l’intégrité des examens.

Ainsi d’Olivia Meleta qui a téléchargé Photomath pour y soumettre toutes les questions de ses tests.

« Si l’application peut résoudre le problème exactement comme je le ferais (…), alors je n’inclurai pas cette question », souligne-t-elle.

Elle a également trouvé des moyens pour empêcher certaines des méthodes de triche les plus conventionnelles revampées à la sauce high-tech à l’ère de l’école Zoom.

Il existe la nouvelle version d’un vieux classique : copier les réponses d’amis. Aujourd’hui, celles-ci sont transmises par texto plutôt que sur une petite feuille de papier.

Pour contrer cette pratique, Mme Meleta remet quatre ou cinq versions du même test afin que ses étudiants se rendent compte que le partage des réponses prend tant de temps que cela n’en vaut pas la peine.

L’inconvénient, bien sûr, est que la préparation d’un examen nécessite plus de temps.

« Tous mes week-ends, tous mes soirs de semaine, y étaient en quelque sorte consacrés », confie-t-elle.

L’enseignante dit avoir constaté une augmentation de la tricherie depuis que les cours sont donnés en ligne, même si c’est encore une minorité d’élèves qui participent.

« C’est beaucoup plus facile, bien sûr, lorsqu’on n’est pas surveillé. Avant, on se disait que si on essayait de regarder la copie de son voisin, le professeur allait le remarquer. On savait que c’était mal. »

Cheryl Costigan, qui enseigne également les mathématiques à l’école secondaire de Thornhill est plus pessimiste. Selon elle, les élèves « trichent plus que jamais ».

« C’est une vraie foire. Tout le monde triche tout le temps, lance-t-elle. Lors du premier examen que j’ai donné, on pouvait entendre le cliquetis des caméras. Ensuite, ils se sont améliorés et ont désactivé le son des appareils. Toutefois, on pouvait toujours savoir que les tests étaient complétés en groupe. »

Les applications comment Photomath ne sont pas le seul problème, observe Mme Costigan. Elle a réalisé qu’elle ne pouvait plus utiliser plusieurs questions provenant d’anciens manuels parce que les réponses peuvent être facilement retrouvées sur Google.

Elle dit comprendre le stress sans précédent ressenti par ses élèves.

Les changements provoqués par la pandémie de COVID-19 n’en sont qu’un aspect, souligne l’enseignante, mais le poids des attentes des parents peut aussi avoir des répercussions.

« Leurs parents insistent sur le fait qu’ils doivent entrer à l’université, dit-elle. Alors ils ont l’impression qu’ils doivent obtenir de bons résultats. Ils ne se soucient plus vraiment de la tricherie. C’est juste devenu une seconde nature. »

SOURCE – Nicole Thompson, La Presse canadienne