L’Université Ryerson propose jusqu’au 4 décembre l’exposition The Edge of the Earth : Climate Change in Photography and Video (Au précipice du monde : le changement climatique par le biais de la photographie et la vidéo).
Imaginée par la commissaire d’exposition Bénédicte Ramade et rassemblant une vingtaine d’artistes contemporains de par le monde, l’exposition appréhende le thème de l’art écologique de façon novatrice.
« L’idée est d’amener les gens à imaginer. Le changement climatique est trop lié aux nouvelles et non pas perçu comme une sorte de durée. Ici on est dans une exposition d’art », observe celle qui a consacré son doctorat à l’histoire de l’art écologique américain.
Le but : s’interroger sur nos vues traditionnelles et défier notre conscience environnementale. Ici, pas d’images ultra-catastrophiques. L’exposition propose de reconsidérer le changement climatique, tout en envisageant les crises actuelles ainsi que les conséquences futures de l’empreinte humaine sur la planète. Et pour ce faire, rien de mieux qu’utiliser l’art pour faire évoluer les idées.
« Il n’y a pas beaucoup de nature dans l’exposition et la seule œuvre nature très verte montre en fait une exploitation de pétrole au sud de Sarnia, explique Bénédicte Ramade. Je sais qu’il y a des mots clés si on dit nature. Tout le monde a des images en tête. L’idée était de contourner ces standards et de se décentrer de cela pour pouvoir proposer d’autres chemins. »
Dépassant le traditionnel brin d’herbe comme témoin de la nature, l’exposition The Edge of the Earth se tourne plutôt vers des formes plus techniques, plus systémiques pour s’attaquer à l’interdisciplinarité induite par la nature.
Le spectateur est notamment amené à découvrir l’œuvre Énergie cinétique d’Évariste Richer. Réalisée telle une carte du ciel, elle représente en vérité des impacts de grêle enregistrés sur le sol des champs. À noter également, la vidéo de l’artiste français Adrien Missika qui filme en très gros plan un cratère formé dans les années 1970 au Turkménistan à la suite d’une erreur humaine de forage. Le feu, qui devait durer une semaine, brûle depuis plus de 40 ans.
Par le biais de l’exposition, Bénédicte Ramade explique aux spectateurs l’ère Anthropocène, une nouvelle époque géologique dans laquelle le monde est entré, et qui marque la totale domination de l’homme sur la planète. L’homme est donc devenu la principale forme commandant l’état et l’évolution du monde.
« L’ère Anthropocène implique que l’on ne peut plus considérer la nature comme quelque chose d’à part. La nature, c’est nous. Les animaux ont du plastique en eux qu’ils ingèrent, jusque dans les plus profondes couches de la terre. Notre présence est lisible : tout cela implique que nous sommes un grand tout. La responsabilité n’est plus désignée, elle est claire. Il va falloir réfléchir à tout un changement de conception à notre rapport aux éléments naturels », conclut la commissaire basée à Montréal. Une exposition à ne pas manquer!
Laurence Stenvot