En utilisant le montage, l’intercalation et la juxtaposition d’images retravaillées des archives de l’Office national du film (ONF), quatre cinéastes des Premières Nations – Caroline Monnet, Kent Monkman, Jeff Barnaby et Michelle Latimer –ont réalisé chacun un court métrage explorant et déconstruisant les stéréotypes cinématographiques avec leur propre vision artistique et critique de l’histoire.
Projetée jusqu’au 13 août au Centre Ryerson de Toronto, cette série de films de trois minutes sans dialogue et en musique, intitulée Souvenir, aborde l’identité des Autochtones et leur représentation, faisant écho au 150e anniversaire du Canada.
« Lorsque j’ai reçu cette commande en vue des Jeux panaméricains de Toronto en 2015, j’ai voulu éviter les clichés tels que les cérémonies. J’ai eu envie de présenter des images positives, en couleur, de montrer des Autochtones en action, qui avancent, qui construisent, loin des stéréotypes d’un passé figé », confie Caroline Monnet, auteure du film Mobiliser.
Pour l’artiste originaire de Gatineau, dont les racines sont autochtones par sa mère et françaises par son père, les Premières Nations sont bien vivantes. Elles ne vivent pas recluses dans les forêts ou confinées dans des réserves. Elles se sont adaptées, ont évolué avec le monde qui les entoure et font partie intégrante de la construction des villes et de la société contemporaine.
Dans un délai très court, une semaine, la réalisatrice a donc recherché et harmonisé des images d’archives parmi 800 œuvres de l’ONF autour d’une scène conductrice : un homme dirigeant son embarcation traditionnelle dans le tumulte d’une rivière.
Ces images qui mêlent paysages, savoir-faire ancestraux et contemporains esquissent dans un mouvement perpétuel un périple à travers les générations, du nord vers le sud, de la nature vers la ville, du passé vers le futur.
La musique punk rythmée de Tanya Tagaq accompagne une succession de plans accélérés comme pour renforcer une évolution galopante, presque incontrôlée, d’une marche en raquette jusqu’à la construction d’un gratte-ciel dans une ville immense où une jeune femme en tenue chic se promène, comme pour affirmer sa place dans un présent qui lui appartient.
Sélectionné dans plusieurs festivals en Amérique et en Europe, ce court métrage a été salué au Sundance Film Festival et récompensé au Yorkton Film Festival pour le meilleur film expérimental.
En attendant la prochaine création de l’artiste de l’Outaouais, un premier long métrage intitulé Bootlegger sélectionné pour CineMart et le marché de la coproduction de Berlinale 2016, cette exposition constitue une escale culturelle enrichissante qui participe à changer notre perception, parfois faussée, souvent simpliste, des Premières Nations et de l’histoire du Canada.