D’ici 2060, la moitié de la population du Canada aura plus de 50 ans, pourtant la société maintient encore et toujours une image négative du vieillissement. Il y a clairement une déconnexion entre ces deux vérités.
Jessica Dupuis est une intervenante psychosociale spécialisée en psycho-gérontologie qui travaille maintenant à la Fédération des aînées et aînés francophones du Canada (FAAFC). Elle observe plutôt l’âgisme comme phénomène ordinaire puisqu’il est si profondément ancré au sein de la culture et de la société canadienne.
Dans un rapport de l’Assemblée francophone des retraités et aînés de la Colombie-Britannique, Mme Dupuis mentionne que « nos perceptions à concevoir et vivre le vieillissement sont très péjoratives et discriminatoires, et ce, sans même nous en rendre compte ».
Une des discussions autour de l’âge est justement la façon dont nous en parlons. L’infantilisation des aînés à cause du langage utilisé pour leur parler et en parler peut devenir très humiliante.
La pandémie a beaucoup présenté cet angle avec une sorte de langage d’appartenance, par exemple : « nos pauvres aînés qu’il faut protéger », comme si cette tranche d’âge était complètement impuissante et inerte.
Mme Dupuis demande la révision des termes humiliants utilisés pour certaines conditions physiques. « Il faut éduquer le personnel du réseau de la santé aux répercussions des termes utilisés. Ce n’est pas une couche d’incontinence, mais plutôt une culotte d’aisance », avise-t-elle.
Vivre dans une résidence de soins continus, dans une situation de vulnérabilité, accroît la possibilité du développement d’une prise de pouvoir malsaine sur les personnes aînées.
Le même phénomène peut aussi prendre forme dans les lieux de travail où les aînés sont vus comme incapables de s’adapter aux nouvelles technologies ou de synthétiser de nouvelles formations.
Leurs attributs, telle leur expertise, ne sont pas considérés lors d’un processus d’embauche malgré qu’en fait, 30 ans d’expérience, ça fait une réelle différence au sein du travail. Les lieux de travail devraient être mandatés d’équilibrer autant que possible la diversité d’âge chez leurs employés.
Jessica Dupuis remarque qu’une des réponses du gouvernement face au vieillissement de la population est de former des centres où tous les services aux aînés sont offerts à un endroit unique.
« La création de tours à logements où on ne retrouve que des aînés et où tous les services sont offerts sous un même toit, du salon de coiffure à la pharmacie, afin que les aînés ne soient jamais à la vue de la population active. »
Cet isolement est problématique à long terme pour tous les membres de la population, car les contacts entre les tranches d’âges sont nécessaires.
Dans un monde qui progresse à irradier le racisme et le sexisme, l’âgisme, lui, est toujours toléré dans la société. Mme Dupuis insiste pour arrêter de représenter les aînés comme faibles, déprimés ou revanchards quand la majorité d’entre eux sont ouverts à la jeunesse et veulent continuer à aider et à être connectés avec leur société. Ils ont beaucoup de sagesse à partager.
SOURCE – Élodie Dorsel