La communauté franco-ontarienne est en deuil. Mariette Carrier-Fraser, un modèle d’engagement et de détermination pour la cause des francophones en Ontario, s’est éteinte le 15 septembre à 78 ans après avoir subi un accident vasculaire cérébral. Cette nouvelle a créé une onde de choc dans toute la province et plusieurs intervenants communautaires n’ont pas manqué de lui rendre hommage.
« L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) accueille avec une très grande tristesse l’annonce du décès de son ancienne présidente, Mariette Carrier-Fraser, la première présidente de l’AFO. Mme Carrier-Fraser a travaillé avec acharnement dans le domaine de l’éducation francophone pendant plus de 36 ans, terminant sa carrière dans la fonction publique ontarienne en tant que sous-ministre adjointe au ministère de l’Éducation. Dans ce poste, elle a travaillé à l’élaboration du projet de loi qui a mené à la création des 12 conseils scolaires de langue française en janvier 1998.
« Au nom de l’AFO, je tiens à offrir mes sincères condoléances à sa famille et à ses proches. C’est une lourde perte pour notre communauté. Son impact sur la communauté franco-ontarienne va continuer à se faire sentir pour plusieurs années à venir. Si nous sommes toujours là et toujours forts, c’est à cause de gens comme Mariette », a déclaré le président de l’AFO, Carol Jolin, par voie de communiqué.
Biographie
Mariette Carrier-Fraser est originaire de Hearst dans le Nord ontarien. Elle a vécu une longue histoire d’engagement envers l’éducation en français comme enseignante et directrice d’école. Elle a vécu et travaillé à Hearst, Toronto, North Bay et Hamilton. Elle a occupé des postes de cadre supérieur au ministère de l’Éducation et s’est assurée que la communauté francophone obtienne ses conseils scolaires de langue française.
Après sa retraite et pour se rapprocher de sa famille, elle est déménagée à Ottawa. Elle a siégé au sein de plusieurs conseils d’administration (CA) dont ceux de l’Hôpital Montfort et du collège La Cité, de la Société Santé en français, du Centre d’appui et prévention, etc. Elle a aussi présidé le CA du Réseau des services de santé en français de l’Est de l’Ontario et récemment, elle s’était jointe au Comité consultatif régional d’Ottawa, mis sur pied par la FARFO.
« Mariette était une personne très sage et bien réseautée. J’avais l’habitude de l’appeler régulièrement pour avoir son avis et ses idées sur toutes sortes de sujets », partage Michel Tremblay, directeur général de la FARFO, sur Facebook. On pouvait se parler pendant des heures au téléphone. Ma dernière conversation remonte à la mi-août quand je l’ai appelée tout en conduisant vers Toronto et on doit avoir jasé une couple d’heures. Entre autres, elle me disait que sa santé allait mieux et qu’elle s’était remise à la marche quotidienne. »
Son implication dans le Sud-Ouest ontarien
Dans le Sud-Ouest, elle a débuté son travail bénévole auprès de la communauté franco-ontarienne en 1969 à Cambridge avec le Centre culturel canadien-français local et s’est fait des alliés auprès des parents pour obtenir dans la région une école élémentaire entièrement consacrée à l’enseignement en français. Elle avait d’autres motivations aussi : sa fille aînée avait commencé l’école l’année précédente dans le système de langue anglaise.
Constatant son talent, les parents canadiens-français l’ont mise en charge de la section de langue française. Puis le conseil scolaire séparé lui a demandé de devenir la directrice fondatrice de l’école Saint-Noël-Chabanel, qui ouvrait ses portes en septembre 1970.
En 1974, elle a dirigé l’école Notre-Dame à Hamilton et s’est présentée au Conseil consultatif de langue française (CCLF) du Wentworth Public School Board, qui venait d’ouvrir l’école secondaire Georges-P.-Vanier.
Sa visibilité dans le milieu éducatif lui a permis d’être recrutée, en 1978, par le ministère de l’Éducation pour coordonner les services pédagogiques aux écoles secondaires de langue française du Centre-Sud. En 1981, le ministère l’a nommée surintendante régionale pour superviser toutes les écoles de langue française du Centre-Sud et en 1983, elle a été nommée sous-ministre adjointe pour l’éducation franco-ontarienne.
Parmi les autres faits saillants de sa carrière, elle a supervisé la mise sur pied des collèges Boréal et des Grands Lacs (1995), tout comme la planification des 12 conseils scolaires de langue française (1997). Elle a pris sa retraite du monde de l’éducation en décembre 1997.
À la retraite, elle s’est impliquée dans de nombreux CA francophones de Hamilton, dont ceux du Centre français, du défunt Club Richelieu et du Centre de santé communautaire.
La dernière pensée pour résumer l’état d’âme des Franco-Ontariens suite au décès de Mme Carrier-Fraser revient à François Boileau, ombudsman des contribuables du Canada, qui l’a côtoyée plus souvent qu’à son tour alors qu’il occupait les fonctions de commissaire aux services en français de l’Ontario.
« Je suis sous le choc d’apprendre le décès d’un autre roc que je croyais éternel, peut-on lire sur Facebook. Quelle tristesse je ressens au départ de Mariette Carrier-Fraser. Un véritable pilier et ce, dans toutes les grandes régions de l’Ontario français. Je manquerai ses conseils judicieux, son intelligence vive, son écoute, sa volonté d’être une actrice de changement déterminée, têtue, forte avec son côté espiègle et toujours aidante.
« Franchement, je suis quasiment en colère. Mais en même temps, tellement reconnaissant qu’elle ait été dans ma vie, comme dans celle de tant d’autres à travers le pays. Merci pour tout Mariette. Et enfin, tu peux te retirer de quelques groupes de travail, mais je suis sûr que tu vas te porter volontaire ailleurs. Le Ciel n’a qu’à bien se tenir. »