Isaac Julien conte les hymnes de la diaspora

Isaac Julien, Western Union Series No. 3 (Flight Towards Other Destinies 2), 2007

Mis en nomination pour le prix Turner, exposé au Centre Georges Pompidou, au Musée d’art moderne de New York, primé au festival de Cannes, participant de la 56ème Biennale de Venise, l’artiste Isaac Julien s’est imposé sur la scène de l’art contemporain depuis ses débuts dans les années 1980. L’artiste et réalisateur présente jusqu’au 23 avril l’exposition Isaac Julien : Autres destinées au Musée royal de l’Ontario (ROM).

Composée de deux projections filmographiques WESTERN UNION: Small Boats (2007) et True North (2004), l’exposition est intégrée dans une présentation en trois temps de l’œuvre d’Isaac Julien qui se déroulera à travers la ville et notamment à l’École d’art et de design de l’Ontario (OCAD).

« Isaac Julien est l’un des penseurs les plus innovant de l’industrie des arts. Son œuvre aborde des sujets sensibles et difficiles d’une façon poétique et visuellement engageante », déclare Silvia Forni, commissaire d’exposition des arts africains au ROM.

Faisant partie des pionniers de l’installation multi-écrans, l’artiste explore thèmes et histoires suivant une narration où poésie et esthétisme dominent. L’occasion pour l’artiste de raconter des histoires à sa façon.

Les deux installations présentées interrogent les questions de la mondialisation, du mouvement et du déplacement et les esthétiques de la géographie.

Isaac Julien, Western Union Series No. 8 (Sculpture for the New Millenium), 2007

Imaginée tel un triptyque, WESTERN UNION: Small Boats entraîne le spectateur dans une expérience immersive. L’artiste y explore les thèmes de la diaspora et les identités transnationales. Le sort tragique des migrants y est raconté au son de chants hypnotiques et d’images pour lesquelles la beauté est transcendée.

Je voulais réactualiser ces histoires. Nous sommes abrutis par les médias. L’idée était d’utiliser une approche différente pour ces questions politiques.

« Ordinairement, on nous propose cette histoire [celle des migrants] avec des faits et des chiffres. J’essayais de la présenter d’une manière plus poétique grâce à des sons et des images. Je voulais réactualiser ces histoires. Nous sommes abrutis par les médias. L’idée était d’utiliser une approche différente pour ces questions politiques. D’une certaine façon c’est une approche lyrique comme une chanson : il y a des chansons tragiques, mais vraiment belles. C’est un hymne », déclare Isaac Julien en entretien avec Le Métropolitain.

Dépouillé de tout dialogue, l’artiste utilise le corps des hommes et la transcendance des paysages pour raconter une histoire, présentant une nouvelle lecture du monde contemporain aux spectateurs.

« Il n’y a pas besoin de paroles. Il y a un dialogue au travers des chansons, des sons et des images. Si on traduit le chant que l’on entend dans WESTERN UNION: Small Boats il est dit : Personne ne sait quand notre temps sur terre finira. Il y a une utilisation des sons et de la musique juxtaposée aux images qui racontent cette histoire », explique le réalisateur britannique dont les origines puisent dans les terres caribéennes.

Isaac Julien, True North Series No. 5, 2004

À quelques pas, l’installation True North présente des images du sublime, utilisant le paysage du Nord comme un élément hypnotique.

Inspirée par l’histoire de l’explorateur afro-américain Matthew A. Henson – l’un des premiers hommes à atteindre le pôle Nord –, l’exposition déroule des étendues blanches à perte d’horizon s’entremêlant sur trois écrans racontant tous une même histoire.

« Je travaille depuis longtemps avec cette idée d’une sorte de réparation esthétique. Il y a toujours une distance dans les faits et dans l’esthétique. Je pense que l’approche de l’artiste est complètement différente. Il y a une question de placer ces histoires comme une sorte de peinture historique. », rapporte-il.

Isaac Julien, 2013. © Graeme Robertson

Isaac Julien : Autres destinées, Musée royal de l’Ontario, du 21 janvier au 23 avril.