Figure emblématique de la scène littéraire jeunesse canadienne, l’auteur québécois Bryan Perro s’est offert au public torontois pendant une heure afin de disserter sur un sujet qu’il affectionne particulièrement : les grands récits mythologiques. Sa série à succès Amos Daragon comporte un grand nombre d’éléments fantastiques inspirés de ces contes et il s’est mis en tête d’expliquer cette influence, cette passion de l’imaginaire qui l’anime. Avec sa longue chevelure et sa barbe hirsute, il ferait presque penser à l’excentrique George R. R. Martin, écrivain-vedette des romans Le Trône de fer, également inscrit au registre du genre médiéval fantastique.

Une vingtaine de personnes s’étaient réunies au théâtre de l’Alliance Française pour écouter maître Perro, le mercredi 25 mars, qui a illuminé cette soirée par ses connaissances et sa verve. Il s’est ainsi lancé dans un échange visant à expliquer les mythes et légendes, et surtout les créatures fantastiques de notre imaginaire commun. Pas de chance pour ceux qui pensaient qu’il allait livrer certains secrets défendus et révéler l’existence des lutins de la vallée du Saint-Laurent, car la seule véritable indiscrétion dont il a fait preuve est celle que tout amateur de fantastique craint : ces êtres ne sont autres que des projections de l’homme, de son comportement, de ses tares, de ses sentiments. Malgré la tonalité presque ennuyeuse que pourrait prendre ce genre de propos, la prestation de Bryan Perro était magistrale. Parvenir à faire rêver une foule désormais persuadée qu’il n’y a rien de surnaturel en dehors de cette salle est un talent rare. Les similitudes entre les légendes de différents pays sont passées au crible, du Korrigan de Bretagne au farfadet irlandais en passant par les lutins africains : tous reflètent un trait de caractère particulier reflétant l’universalité du thème. Même si les formes adoptées sont différentes, le symbole est bien comparable. « Le mythe de l’homme qui se transforme en loup est présent en Europe mais pas en Afrique. Pourquoi?, interroge-t-il le public qui répond à l’unisson qu’il n’y a pas de loup dans cette région du monde. En effet, ajoute-t-il, ils se transformeront là-bas en lion ou en léopard, mais le sens est le même. Il s’agit simplement de représenter la bête intérieure de l’homme. »

Ses traits d’humour, son enthousiasme et son dynamisme sur scène ont attisé la curiosité du public, qui était majoritairement pendu à ses lèvres. Utilisant les expériences personnelles des intéressés, il est parvenu à transmettre sa passion et, qui sait, peut-être même à inciter d’autres personnes à prendre la plume. 

Photo: L’auteur québécois Bryan Perro