La sensation de puissance que dégagent les différentes danses africaines est indéniable. Toutefois, rares sont ceux qui parviennent à leur donner ce petit plus, le talent nécessaire pour transcender les mouvements et les imposer au rang d’art. Lua Shayenne and Company fait partie de ces troupes qui ne font pas qu’interpréter, mais qui réinventent et s’approprient toute une série de gestes ancestraux afin de leur donner une saveur contemporaine unique.

Ainsi, c’est à l’occasion d’un nouveau spectacle intitulé cos.mo.pol.i.tan que cette compagnie va se produire au Studio Theatre d’Harbourfront Centre les 29, 30 et 31 mai. Une première mondiale qui mettra en lumière dix artistes, six danseurs, et quatre musiciens, dont le directeur musical et percussionniste Amadou Kienou ainsi que le compositeur Reza Moghaddas. Tous furent réunis par Lua Shayenne, arrivée au Canada voilà cinq ans et qui a à cœur de refléter le métissage. Fille d’un Italien et d’une Ghanéenne, elle voit le jour en Côte d’Ivoire où elle apprend le français, avant de passer de nombreuses années en Italie. Divisée en deux pièces, Landed Immigrant et Hybrid, sa dernière production s’inspire de son vécu d’immigrante aux origines diverses et ceux qui y prennent part proviennent également d’horizons différents.

Figure reconnue, elle a collaboré avec de nombreux chorégraphes de réputation internationale et a reçu diverses récompenses pour ses prestations. Elle anime également de nombreux ateliers de danse et de théâtre pour plusieurs écoles et organisations, afin de sensibiliser le plus grand nombre aux joies de la vie d’artiste.

Mme Shayenne commente son parcours : « J’ai toujours voulu faire de la danse et je voulais vivre à Toronto. Le rêve américain en quelque sorte. » Après avoir étudié les arts dans la Ville reine, elle décide de retourner à ses premiers amours : « Je voulais retourner à mes racines, c’est pour cela que j’ai choisi la danse africaine » C’est à l’âge de 20 ans qu’elle se lance dans ce domaine, malgré le fait que ce milieu considère cela comme tardif. Elle explore alors différents pays comme le Mali, la Guinée ou encore le Sénégal, pour s’imprégner de ces pas de danse et de ces cultures si particulières. Quand elle revient au Canada, la tête pleine, elle évolue presque naturellement vers la chorégraphie, où elle se sent comme un poisson dans l’eau. Une vocation qui l’amènera à monter sa propre compagnie pour y exprimer sa vision. Une vision faite des histoires et émotions que partagent les candidats à l’expatriation. « C’est une histoire personnelle et un thème universel, s’exclame-t-elle. J’en parle car je suis dans un pays multiculturel. » Là est l’objectif affiché par Lua Shayenne : provoquer une discussion et des défis envers le terme de « race », sur le thème de l’identité.

« J’espère que les gens vont venir pour voir cette explosion de danse, dit-elle. Je veux que le public sache qu’il verra quelque chose de nouveau ». Une énergie et un optimisme à toute épreuve qui devraient se poursuivre bon an mal an en 2015, avec l’apparition de nouvelles pièces inspirées de ses précédentes productions.

Photo : Natasha Phanor et Allyson Trunzer dans Landed Immigrant