« J’étais à mon poste de travail, j’étais un peu perdu dans mes pensées. C’est drôle, j’ai eu un flash! J’ai ressenti beaucoup d’amour pour les gens qui travaillent autour de moi. J’ai pensé : il y a quelque chose qui est là. Tous les gens qui constituent ce bureau sont cette énergie-là, mais aussi tout ce concept du bureau. »
Gaël Patino est un jeune artiste originaire de Montréal. C’est son expérience dans un centre d’appels à Toronto qui a inspiré l’exposition We will return your call qu’il présentait à la Gallery 50.
Ce corpus d’œuvre inspiré du chamanisme et des centres d’appels est une fenêtre ouverte sur l’univers de l’artiste résolument moderne et sa vision sur notre société, elle aussi, moderne.
« Plus que moderne, c’est l’hypermoderne qui m’intéresse. Tout à l’excès, tout à la carte. Le paysage nord-américain du XXIe siècle que les gens considèrent vide, c’est ça qui m’intéresse », explique Gaël Patino.
Pas étonnant que l’artiste ait trouvé l’inspiration au milieu des sonneries d’un centre d’appels. Autour de lui, il imagine des bactéries qui sortent des climatiseurs alors que des héros, tous droits débarqués de jeux vidéo, prennent forme.
L’imagerie du jeu vidéo de la fin du XXe siècle joue un rôle essentiel dans la série présentée. Chaque tableau, mélange de peinture, de sculpture numérique et de photographie, représente une forme, comme un esprit, un super-héros sorti tout droit des années 1980.
« C’est l’obsessions avec la fin du XXe siècle, son esthétique synthétique, virtuelle et numérique. Je les ai représentés d’une façon plus primitive au niveau de l’imagerie numérique, note Gaël Patino. J’aime cette imagerie parce qu’elle a vraiment un langage. »
Dans son imaginaire, l’idée elle-même du centre d’appels devient un être vivant à part entière et la communauté du bureau le rappelle à la pratique du chamanisme, lui qui perçoit cette exposition comme une déclaration d’inclusion.
« On est tous de la matière. Ce qui m’intéresse depuis longtemps c’est le mélange du rêve et de la réalité, comment les choses du rêve peuvent s’intégrer dans la réalité. J’aime beaucoup les héros et la mentalité. Les héros ont tendance à s’incarner dans notre monde et influencer beaucoup d’actions. »
C’est d’ailleurs au sein même de son centre d’appels que Gaël Patino a présenté pour la première fois la série We will return your call, entouré de ses collègues dans un esprit très… chamanique : « C’était un festin pour les dieux », conclut-il avec malice.