Organisé par le Centre canadien pour l’unité de la famille, le premier rassemblement virtuel « Un soir au village » se tenait le vendredi 10 juillet. L’organisme met sur pied aux deux semaines des activités de ce genre pour rendre la culture accessible alors que la vie sociale se restreint encore largement, pour le moment, au web et ainsi faire passer un bon moment aux internautes.
C’est entre les mains de Kaabi Kouyaté et de Fété Kimpiobi que cette soirée a été confiée.
M. Kouyaté est un musicien et chanteur qui, s’il ne dédaigne pas s’abandonner de temps à autre aux influences musicales contemporaines, n’en est pas moins un griot guinéen dans la plus pure tradition.
Quant à Mme Kimpiobi, elle est très connue dans la région du Niagara où elle est directrice générale de SOFIFRAN, un organisme à vocation sociale et culturelle.
Engagement communautaire mis à part, Fété Kimpiobi a aussi un violon d’Ingres : la littérature. Ce sont particulièrement les contes africains ou, de manière générale, toutes les histoires desquelles se dégage une morale qui retiennent son attention. C’est la raison pour laquelle, entrecoupées des mélodies de Kaabi Kouyaté, trois histoires ont été livrées à l’assistance virtuelle par Mme Kimpiobi, conteuse aguerrie.
Le premier récit, Les trois sourds, mettait en scène des personnages de l’Afrique rurale : une paysanne, un éleveur de moutons et un juge de village. Tous trois, comme le titre l’indique, n’avaient pas l’ouïe très affinée et un malentendu donne lieu à un dialogue de sourds, au sens propre comme au sens figuré. Au bout du compte, c’est la bonne humeur qui l’emporte et chacun comprend qu’il vaut mieux y réfléchir à deux fois avant de parler.
Dans Histoire insolite, ce n’est pas un conte imaginaire que Fété Kimpiobi a raconté, mais la première de deux anecdotes personnelles. « Ce sont des petites histoires qu’on peut appeler des faits divers, mais qui nous font faire de grands sauts dans la vie », a-t-elle commenté.
Cela s’est passé dans les jours précédant Noël, alors qu’elle procédait, pour le compte de SOFIFRAN, à l’achat de cadeaux pour des enfants d’immigrants. En quittant le stationnement du magasin, une voiture tamponne la sienne. Mme Kimpiobi et l’autre conductrice doivent se rendre au poste de police et, à un certain moment, se retrouvent seules dans la même pièce.
Jusque-là mécontente de voir sa journée gâchée de la sorte, Fété Kimpiobi retrouve sa sérénité en nouant connaissance avec l’autre conductrice qui lui confie avoir récemment perdu son mari et ne pas avoir de parenté à Welland. L’inconnue se met alors à pleurer et Mme Kimpiobi, elle-même veuve, la prend dans ses bras pour la consoler.
La directrice générale de SOFIFRAN a alors réalisé que ce qui était jusqu’alors un incident désagréable – l’accident – s’était mué en moment profondément humain. Plus tard, cette même dame s’est rendue au bureau de l’organisme pour faire un don en argent destiné à l’achat de cadeaux pour les jeunes.
De l’avis de la conteuse, ce fut le plus beau Noël qu’elle ait vécu depuis son établissement au Canada.
Dans Tout a un sens, Mme Kimpiobi a partagé des émotions que tous ont déjà vécues au moins une fois : le stress intense et l’humiliation. Il y a plusieurs années, elle a fait un voyage en France avec trois nièces pour aller visiter sa cousine.
Avant son départ, une tante lui a confié un tube rempli de documents importants pour qu’elle le remette à cette cousine. Arrivée à Paris, Fété Kimpiobi en confie la garde pendant quelques instants à une des nièces… qui l’égare.
Était-ce dans le taxi? Dans le métro? Pendant trois semaines, Mme Kimpiobi n’ose avouer la vérité à sa cousine et téléphone à gauche et à droite en espérant un miracle. À la fin de son séjour, résignée, elle se résout à avouer la vérité à sa cousine alors que l’improbable se produit : dans un tout autre secteur de Paris que celui où elle était arrivée, elle tombe par hasard sur le chauffeur du taxi qu’elle avait pris au début de son voyage. Celui-ci la reconnaît et lui dit avoir laissé le tube, faute de mieux, à l’ambassade de la République démocratique du Congo.
Curieusement, personne à l’ambassade n’avait jusque-là pris l’initiative de se servir des renseignements contenus dans les documents pour contacter la cousine de Fété Kimpiobi. Cette dernière a donc remis le tube à sa parente sans perdre la face et cette mésaventure s’est conclue sur une leçon d’humilité et sur le sentiment que tout est connecté pour le mieux dans l’univers.
Cette soirée émaillée de devinettes et d’échanges avec le public fut bien appréciée des participants. Les prochaines rencontres se tiendront, de 19 h à 20 h 30, les 24 juillet, 7 et 21 août, et mettront en vedette le musicien Amadou Kienou, l’auteur Gaston Mabaya et la chanteuse, comédienne et conférencière Woodney Pierre.
PHOTO : Fété Kimpiobi