Le lundi 28 janvier, dans la grande salle de l’hôtel Gladstone, Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) a organisé un « café scientifique » à propos de la démence. Un symptôme très célèbre, mais finalement peu connu et surtout, très stigmatisé. Quatre chercheurs ont participé à cet évènement, dont le professeur Yves Joannette qui en était le modérateur.
« Les cafés scientifiques existent depuis une dizaine d’années et, depuis tout ce temps, ils poursuivent le même objectif : rapprocher la communauté des chercheurs du grand public », raconte le professeur Joannette. Il faut y voir bien sûr, un échange de connaissances. Les chercheurs se placent naturellement sur un plan pédagogique, brisent parfois les idées toutes faites et tâchent de répondre (lorsque cela est possible) aux questions du public.
« L’échange se fait dans les deux sens, poursuit M. Joannette. Les chercheurs se nourrissent des questions et des réflexions du public. »
Un public qui, par ses interrogations et ses réflexions, peut aller jusqu’à influencer le chercheur dans son travail ou, en tout cas, dans la direction de son travail. « Après tout, poursuit-il, c’est pour le public, et grâce à l’argent des impôts que nous pouvons faire de la recherche. »
Le café scientifique du jour est consacré à la démence. Le but est de la démystifier. Il pèse un étrange stigma sur la démence, ce symptôme de maladies dégénératives, dont la plus connue est celle de l’Alzheimer. Les gens qui en souffrent, des personnes âgées la plupart du temps, font souvent l’objet de moqueries. Dans les films, dans les conversations, ils sont un sujet de plaisanterie acceptable. De toutes manières, ils ne sauraient se plaindre, puisqu’ils n’ont plus conscience d’eux-mêmes.
Il arrive même parfois que des patients souffrant de démence soient maltraités par des auxiliaires de vie ou qu’on leur refuse l’accès à des transports spécialisés pour malades.
Si le stigma contre la démence est aussi fort, c’est d’abord parce qu’il fait peur.
C’est également parce que la démence, synonyme de vieillesse, nous attend presque tous au tournant. Presque tout le monde devra soit y faire face ou supporter un proche qui en souffre.
Pourtant, rappelle Christopher Patterson, médecin et professeur responsable du service gériatrique de l’hôpital d’Hamilton, « nous avons tendance à l’oublier, mais les personnes souffrant de démence sont des personnes ». Elles éprouvent les mêmes émotions que tout le monde. Humiliations, peines, douleurs. Ce n’est pas parce que la mémoire flanche que les sentiments se dissolvent.
Et même si le cerveau répond un peu plus lentement, l’affection ou les réflexes d’amour et de respect restent tout aussi forts.
Julie Foley, soignante et consultante en santé, a raconté l’anecdote d’un patient, vétéran de guerre, qui refusait de se lever de son fauteuil roulant, alors qu’il le pouvait. Son infirmière a alors chantonné l’hymne national. Le patient s’est levé aussitôt et, très droit, il a exécuté un salut protocolairement parfait.
Il y a beaucoup de choses que nous ne savons pas encore sur la démence. Mais c’est grâce à des rencontres comme les cafés scientifiques que le stigma entourant les maladies diminuera.
Photo : De gauche à droite : Yves Joannette, Christopher Patterson, Pia Kontos et Julie Folley