Le Métropolitain

L’Holocauste et la responsabilité de la mémoire

C’est un aîné qui prenait la parole à la Bibliothèque de référence, le mardi 8 novembre, devant plusieurs élèves. Il venait raconter l’histoire d’un petit garçon de 10 ans et sa vie en Belgique durant la Seconde Guerre mondiale. Ce petit garçon c’était lui, Paul Henri Rips, survivant de l’Holocauste et auteur de Matricule E/96. C’est dans le cadre de la Semaine de l’éducation sur l’Holocauste que l’homme venait raconter son histoire, une chance pour les élèves présents aujourd’hui, car plus le temps passe et plus les occasions d’entendre des survivants se font rares.

« Comme survivant de l’Holocauste, je porte sur moi le poids des mémoires qui me hantent et ceci est vrai pour tous les survivants, expliquait Paul Henri Rips. Les expériences de l’Holocauste sont dans notre âme, dans nos cœurs, dans nos idées et dans nos silences. »
Alors, il raconte son histoire, celle d’un fils de diamantaire d’Anvers, un enfant très innocent qui se dit « Chouette, il n’y pas école aujourd’hui » au début de la guerre. Pourtant, très vite, cette dernière le rattrape et les parents du jeune Henri tenteront dès le début de la guerre de s’échapper. Une tentative infructueuse : la famille sera ramenée à la frontière par les Nazis.

La monté en puissance du racisme se fait sentir en Belgique se rappelle l’auteur, qui se souvient d’une vie « plutôt calme » au début de la guerre, « mais avec beaucoup de pression », pour après apporter l’étoile jaune et les lois raciales.
La famille tente de s’échapper une seconde fois vers la France qui n’est occupée qu’à moitié. A Dôle ils sont abandonnés par leur passeur et repérés par un soldat allemand.

« J’avais 11 ans. J‘étais absolument épuisé d’avoir marché sur des champs labourés toute la nuit. Je me suis étendu sur un banc et je me suis endormi. Quand on m’a réveillé, il faisait jour, un camion nous attendait pour nous emmener vers la prison. »Après cela, ce sera le camp de Pithiviers, un camp de transit français pour les étrangers.

« Ce n’était pas toujours marrant, mais là nous étions toujours ensemble. Mes parents ma sœur et moi » se rappelle-t-il.
Ils seront rapidement rapatriés dans une Belgique qui a encore durci ses lois raciales : interdiction de prendre les transports publics, de pratiquer sa profession, couvre-feu spécial pour les Juifs plus tôt que pour la population…Et puis, un jour, son père tombe malade et doit être emmené à Bruxelles. « Nous ne l’avons plus jamais revu », raconte le petit garçon d’alors qui se rappelle le retour de sa mère tard dans la soirée leur annonçant la nouvelle de sa mort.

Le 3 septembre 1943, à 6 h du matin, une voisine vient frapper à leur porte : « Fichez le camp, leur dit-elle, ils ont pris les autres Juifs à côté ».
« On prend nos manteaux et nous partons. On enlève l’étoile jaune, mais maintenant où on va? Nous étions des illégaux », explique Paul Henri Rips.
La famille se rendra à Bruxelles où ils ont des amis et le petit Henry est envoyé dans un pensionnat dans les Ardennes. Mais encore une fois, le voilà rattrapé par les nazis avec les SS cette fois-ci qui toquent à la porte. Il sera emmené au camp de Malines, et évitera la déportation et survivra dans le camp grâce à ses faux papiers d’identité.

« Parfois, nous nous demandons si les autres veulent écouter ces histoires, s’interroge le survivant. Nous parlons nous, qui avons vu nos familles presque éradiquées, pour honorer les victimes de l’Holocauste. Il faut lire les témoignages des gens qui ont été dans les camps et connaître ce fait presque inimaginable par la profondeur de sa perversité. Lorsqu’il n’y aura plus de survivants, vous, les enfants, les générations suivantes, devraient prendre cette responsabilité. »

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