Les routes de l’ouest de la France resplendissent d’une nuée de couleurs au printemps. Le jaune des boutons d’or et des primevères, le blanc des marguerites, le rouge des coquelicots et le pourpre des lupins illuminent les bas-côtés. Depuis environ quatre ans, les services d’entretien des routes ne coupent plus la végétation à raz comme ils avaient l’habitude de le faire auparavant.
« Les accotements, talus, haies, fossés et autres giratoires (NDLR : ronds-points aménagés à la plupart des carrefours de routes en France) constituent de véritables refuges pour la faune et la flore; ils jouent naturellement le rôle de corridors biologiques entre des espaces naturels », explique un dépliant publié par le Conseil général des Côtes d’Armor, un des cinq départements administratifs de Bretagne.
Pour éviter d’éliminer ces zones importantes au sein de l’écosystème, les bords des routes sont désormais fauchés moins fréquemment et différemment. Une première passe est effectuée au printemps, suivie d’une deuxième en été. Au lieu de couper sur toute la largeur, on fauche simplement sur une largeur d’au plus un mètre. On épargne ainsi le reste des bas-côtés, là où les herbus et les fleurs jouent un rôle si important pour la préservation et la reproduction des espèces. Le même dépliant indique que pas moins de 36 espèces de papillons ont été recensées dans les Côtes d’Armor. On estime que la moitié de la population des papillons a disparu en France lors des 20 dernières années. La préservation de ces zones herbeuses ralentit aussi le ruissellement trop rapide des eaux. Un nettoyage plus approfondi des fossés et talus est enfin reporté à la fin de l’automne, période moins critique pour la faune et la flore.
La sécurité des automobilistes n’est cependant pas compromise. La fine bande de coupe permet un arrêt d’urgence ou bien un accès aux piétons. Les zones près des intersections sont rasées afin de ne pas obstruer la bonne visibilité. En fauchant moins souvent et de façon plus sélective, les services d’entretien des routes français économisent jusqu’à 15 % en carburant et 20 % en usure d’équipement. Argument de poids quand on sait que la machine économique tourne au ralenti en Europe à l’heure actuelle.
Mais c’est surtout l’aspect esthétique qui frappe les automobilistes d’avril à juillet. Certaines routes de campagne offrent un spectacle ravissant. Le long des certaines routes, on a presque l’impression que les automobilistes ralentissent pour le contempler. Il n’est pas sans rappeler le phénomène tout aussi étourdissant des couleurs automnales chez-nous au Canada.
Photo : Fauchage tardif sur le bord des routes en France