Pour la Journée internationale des droits des femmes, Oasis a proposé une table ronde sur la technologie et son impact sur la violence faite aux femmes. Cinq d’entre elles partagent des connaissances de prévention et d’intervention en matière de lutte contre les violences qui leur sont faites.
L’autrice, compositrice et interprète, Janie Renée, s’est prêtée à l’animation du panel.
« Les femmes qui expriment leurs opinions suscitent toujours des réactions et font face à énormément de violence en ligne », affirme Maïra Martin, directrice générale d’Action ontarienne de la violence faite aux femmes.
Elle explique que l’anonymat, typique du monde virtuel, donne l’impression qu’il n’y a pas de vraies conséquences. « Le harcèlement, c’est vraiment la personne qui dit Tu n’as pas ta place ici. Et souvent en ligne, l’effet de groupe fait croire que cette haine est acceptable », précise-t-elle.
Marie-France Lefort, coach de processus consultatif et stratégique, dénonce le comportement des compagnies des médias sociaux comme problématique. « On est sous surveillance avec les algorithmes des médias sociaux. On reçoit des choses qu’on ne voudrait pas nécessairement voir. Pour moi, c’est une violence », déclare-t-elle. Elle propose le recul comme technique pour gérer l’agressivité des médias sociaux. « Il faut se demander ce qui est bien pour soi, propose-t-elle. Pourquoi suis-je attirée par cette image? Cela joue-t-il sur mes émotions ou y a-t-il des faits concrets? »
La question liée à la destination de toutes ses données est assez anxiogène. « La sécurité en ligne peut créer de la paranoïa quand il y a un manque de connaissances », indique Alice Fomen, doctorante en technologie éducative. Avec Seeva, sa compagnie, elle tente de former les femmes en littéracie numérique afin qu’elles puissent bénéficier de la technologie avec plus de sécurité.
« Il y a une fracture numérique entre les femmes et les hommes. La pauvreté cause aussi des situations d’exploitation », ajoute Aline Nizigama, employée du Centre francophone du Grand Toronto. Selon elle, le numérique a facilité la traite des personnes, notamment du corps des femmes. « Il faut responsabiliser les plateformes des médias sociaux aussi, car elles ont tellement de pouvoir », exprime-t-elle.
De l’autre côté de la médaille, le virtuel a rendu diverses activités plus accessibles. Diewo Diallo, gestionnaire de programmes à Oasis Centre des femmes, a vu une hausse des participantes à certaines activités en ligne.
« Parfois, par contre, ce n’est pas mieux pour le partage car la femme se connecte depuis un lieu défavorable, proche de l’agresseur peut-être, où elle ne peut parler librement », explique Mme Diallo. Selon elle, il faut tout de même remettre le pouvoir décisionnel de sécurité entre les mains des femmes pour qu’elles soient au contrôle.
Les conférencières ont aussi mentionné le dialogue du « faire attention » lié à ce que la société enseigne aux filles. Le dialogue peut facilement devenir une culpabilité chez la femme.
« Je n’ai pas fait assez attention et donc, c’est de ma faute. On demande aux filles de se rendre plus petites finalement, à leur détriment », explique Mme Martin. « La rétrospection, sentir qu’on a notre place, est l’arme pour tenir tête aux réseaux sociaux », conclut Mme Lefort.