Le Métropolitain

L’artiste Maryse Arseneault partage ses expériences au Labo

Le Labo, le centre d’arts médiatiques francophone de Toronto, accueillait le 15 janvier l’artiste multidisciplinaire acadienne Maryse Arseneault pour un séjour d’un mois. Première artiste en résidence de 2018 au Labo, Mme Arseneault a eu l’occasion au cours des dernières semaines de travailler à divers projets. C’est pour relater son parcours en général et pour décrire ses récentes œuvres conceptuelles réalisées dans la Ville reine que la jeune femme accueillait le public à sa causerie dans les locaux de l’organisme le 10 février dernier.

Maryse Arseneault

Née à Moncton où elle a entrepris des études universitaires qu’elle a poursuivies à Montréal où elle réside aujourd’hui, Maryse Arseneault se penche sur une variété de thématiques recourant souvent aux objets usuels et aux gestes du quotidien. Son travail consiste alors à en explorer l’origine, à les remettre en question et à dégager leur rapport à la culture environnante. Un autre sujet récurrent réside dans les questions de société propres à notre époque.

L’artiste a d’abord procédé à un survol de ses œuvres des dernières années. Mme Arseneault s’est ainsi intéressée aux mécanismes du corps humain et, dans une inspiration insolite née de rêves qu’elle faisait, à ce qu’il lui faudrait pour voler. À l’université, elle a mise en scène une atmosphère de cuisine pour contraster les besoins d’une soupe populaire et les attentes d’une société néolibérale. Une autre de ses idées anticonformistes, exprimé par un faux téléphone public, consistait en une réflexion sur le fait que les gens ne se tournent pas vers leur communauté, leur environnement social immédiat, lorsqu’ils ont besoin d’aide. Dans les deux cas, ces projets à multiple facettes incluaient la participation de volontaires ou de simples passants.

Dans une sphère plus traditionnelle, Maryse Arseneault s’est aussi livrée à des séries de dessins d’objets, tels des gants et des gilets de sauvetage, dans la perspective d’initier une réflexion sur ce qui se perd et ce qui reste de la réalité une fois celle-ci représentée.

Au Labo, elle a mis à profit l’équipement à sa disposition pour créer une vidéo surréaliste sur l’art de plier des couvertures, renouant avec le décodage des rituels et des gestes de la vie de tous les jours. Ce qu’elle appelle « mémoire rituelle », réflexes inconscients mille fois répétés et transmis à chaque génération, l’inspire à utiliser diverses approches artistiques : « Je vais constamment d’un médium à l’autre avec mes sujets », explique l’artiste. Ses projets ont rarement une conclusion explicite de sorte qu’ils peuvent être alimentés à nouveau. « Ce qui est important pour moi, c’est de rester en communication avec la matière », précise Maryse Arseneault pour étayer sa démarche.

L’abstraction qui caractérise son art s’est conjuguée à la dénonciation des problèmes de pauvreté en milieu urbain lors de son séjour au Labo à l’occasion d’un partenariat avec Marcel Grimard. Ce nom sonnera familier à l’oreille de plusieurs car M. Grimard a été, il y a quelques années, président de Reflet Salvéo. Or, il a depuis décidé de changer de carrière du tout au tout et étudie présentement en arts visuels à l’Université Brock de St. Catharines.

C’est ainsi que Marcel Grimard a été reçu en micro-résidence au Labo où, en deux jours, lui et Mme Arseneault ont créé un court-métrage portant sur la spéculation immobilière à Toronto, l’embourgeoisement des quartiers qui en résulte et la difficulté à se loger que vivent un nombre croissant de personnes à faible revenu. La vidéo met en scène un sans-abri méconnaissable car recouvert de ces petits pansements vendus en pharmacie, illustrant en cela les solutions dérisoire et à la va-vite des autorités publiques au problème de l’itinérance.

Suite à la projection de la vidéo, le public a été invité à échanger avec les deux artistes qui ont pu relater plus en détail leur collaboration. La thématique sociale est aussi revenue au fil de la discussion et les participants ont abordé plusieurs thèmes de nature politique et économique inspirés par le visionnement de l’oeuvre.

Maryse Arseneault n’est pas étrangère à ces débats. L’éloignement de Moncton, où elle a des attaches, lui pèse parfois, d’autant plus qu’elle aimerait souvent s’impliquer dans des dossiers qui touchent la communauté qui l’a vu naître. Malgré tout, Montréal, et maintenant Toronto, auront été des étapes formatrices importantes dans son parcours d’artistes.

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