Le Métropolitain

La Troupe des Anciens présente Les Femmes savantes

Henriette va-t-elle pouvoir épouser Clitandre? La jeune femme a pourtant la bénédiction de son père et de son futur beau-père. S’il en tient cependant qu’à sa mère, sa sœur et sa tante, l’union ne se fera pas. Ces « femmes savantes » la verraient plutôt s’unir à Trissotin, un bellâtre dont les vers ridicules n’ont d’égal que son air prétentieux. 

Leur amour immodéré pour la philosophie et les belles lettres va-t-il continuer de les rendre aveugles face au vrai dessin de Trissotin, à savoir la dote de la jeune fille? Dans le pur style de la commedia dell’arte, Molière peint un tableau comique et acerbe des mœurs de son temps. On se demandait alors s’il était vraiment raisonnable d’éduquer les jeunes filles. 

« Il n’est pas bien honnête, et pour beaucoup de causes / Qu’une femme étudie et sache tant de choses. » (Chrysale, Acte II, scène 7)

Présentée cette année par La Troupe des Anciens de l’Université de Toronto, Les Femmes savantes de Molière ne manquèrent pas de faire rire le public du Théâtre George-Ignatieff. Depuis plus de 40 ans au mois d’avril, la fondatrice de la troupe – Paulette Collet – porte ainsi à la scène une pièce du répertoire classique français. La même passion anime cette ancienne enseignante de français à la retraite qu’aux tout premiers jours. Des surtitres en anglais sont projetés pour permettre aux francophiles de saisir les subtilités des alexandrins de Molière. 

D’année en année, Mme Collet fait appel à un noyau de fidèles admirateurs pour non seulement jouer la comédie, mais aussi pour se charger des costumes, des éclairages, de la musique, des décors et des accessoires. 

Parmi les comédiens qui présentèrent Le Malade imaginaire l’an passé, on retrouvait donc cette année Daniel Bourque (Trissotin), Régine Guyomard (Henriette), Geneviève Proulx (Philaminte), Elizabeth Bucci (Bélise), Glenn K.L. Chu (Vadius), Jim Easton (le notaire) et Éli Morad (Chysale). D’autres, dont certains membres de longue date de la troupe, vinrent s’ajouter tels qu’Élisabeth Widner (Martine), Robert Quickert (Ariste), Grant Weavers (Julien) et Alexandra Eshelman (Armande) et Kenza Vandenbroeck (L’Épine). Cédric Aria (Clitandre) a rejoint le groupe cette année.

Le jeu de scène et les magnifiques costumes donnèrent plein effet à la préciosité de certains personnages. L’accoutrement et les longues déclarations vides de sens de Daniel Bourque mirent parfaitement en relief le caractère pédant et trahirent les réelles intentions de Trissotin. Les interventions ridicules et coiffure fantasque d’Élizabeth Bucci firent rire la salle et ne manquèrent pas d’accentuer le comportement grotesque de Bélise. 

Face à l’admiration béate de Philaminte pour les « beaux mots » des auteurs de l’époque, bien rendue par Geneviève Proulx, Régine Guyomard, Cédric Aria, Éli Morad et Robert Quickert surent faire ressortir le bon sens que leurs personnages sont censés représenter. 

Il revint enfin à Chrysale (à moins que ce soit Molière qui parle) d’asséner le coup de grâce : « Je vis de bonne soupe, et non de beau langage. / Vaugelas n’apprend point à bien faire un potage, / Et Malherbe et Balzac, si savants en beaux mots, / En cuisine peut-être auraient été des sots. »

Photo : La Troupe des Anciens

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